Au moins 18 personnes ont été tuées et une centaine blessées jeudi soir dans un attentat à la voiture piégée contre un immeuble abritant des bureaux de la police antiterroriste de Karachi, la grande ville du sud du Pakistan, selon les autorités locales.

L'attaque a été revendiquée par les talibans pakistanais, dont les innombrables attentats contre les autorités gouvernementales et forces de sécurité avaient jusque là relativement épargné Karachi, capitale financière et mégalopole de quelque 17 millions d'habitants.

Karachi, grand port sur la mer d'Oman d'où partent chaque jour les dizaines de camions citernes chargés de ravitailler en carburant les forces de l'Otan en Afghanistan, était secouée ces derniers mois par les assassinats politiques et attentats visant des minorités religieuses.

L'attentat a visé des bureaux de la police criminelle et anti-terroriste (Crime Investigation Department, CID), dans l'un des quartiers les plus sécurisés de la ville, proche des bureaux gouvernementaux, du consulat américain et des grands hôtels fréquentés par les Occidentaux.

Les assaillants, en nombre indéterminé, ont d'abord ouvert le feu sur les policiers de faction avant de précipiter leur véhicule bourré d'explosifs contre le bâtiment de deux étages, qui s'est effondré, selon la police.

Ce mode opératoire, ainsi que le cratère creusé par l'explosion, rappellent, à une moindre échelle, l'attentat au camion piégé contre l'hôtel Marriott d'Islamabad qui avait fait une soixantaine de morts en septembre 2008.

«J'ai entendu une énorme explosion. J'ai couru sur les lieux, et j'ai vu des cadavres et des blessés étendus sur le sol», a raconté à l'AFP Mohammad Arshad, un policier de 32 ans, les vêtements couverts de sang.

L'immeuble abritait une prison où la CID détenait régulièrement des criminels et terroristes de haut rang, ainsi que des commissariats pour hommes et pour femmes. Des résidences de policiers se trouvant à proximité ont été très endommagées par l'explosion.

Celle-ci a soufflé les vitres sur près de deux kilomètres à la ronde, jonchant les rues de bris de verre. Dans la nuit de Karachi, les équipes de secours avaient installé des lampes projecteurs pour les aider à fouiller dans les débris à la recherche de survivants.

«Au moins 18 personnes ont été tuées», a déclaré à la presse sur les lieux le chef de la police de la province, Salahuddin Babar Khattak.

«130 blessés ont été amenés dans les hôpitaux», dont «25 femmes et 20 enfants», a indiqué à l'AFP Hamid Parhiar, un médecin de la police provinciale.

«Nous revendiquons cette attaque. Ils y arrêtaient et torturaient nos camarades. Tous ceux qui feront de même subiront le même sort», a déclaré à l'AFP Azam Tariq, porte-parole du Mouvement des talibans du pakistan (TTP).

«La CID avait arrêté plusieurs terroristes, mais aucun d'entre eux ne se trouvait dans l'immeuble au moment de l'attaque», a précisé M. Babar Khattak.

Vendredi dernier, au moins 65 personnes avaient été tuées et 120 blessées dans deux attaques contre des mosquées dans le nord-ouest.

Le Pakistan a été ensanglanté depuis trois ans par plus de 400 attentats et attaques -essentiellement suicide- qui ont fait plus de 3800 morts.

La plupart ont été attribuées pour la plupart au TTP et à ses alliés. Le TTP, qui a fait allégeance à Al-Qaïda, a décrété à l'été 2007 le jihad contre Islamabad pour son soutien à la «guerre contre le terrorisme» de Washington.

Fief des talibans pakistanais, les zones tribales du nord-ouest, frontalières de l'Afghanistan, sont devenues un des principaux sanctuaires d'Al-Qaïda dans le monde, mais aussi la base arrière des talibans afghans. Les drones de la CIA y procèdent quasi-quotidiennement à des attaques.