Quatre manifestants ont été tués et au moins vingt-cinq blessés par la police mercredi au Cachemire indien, territoire à majorité musulmane secoué depuis trois mois par un puissant mouvement de protestation contre l'autorité de New Delhi, a annoncé la police.

La police a ouvert le feu lors d'un rassemblement à Mendhar, poche musulmane à 210 km au nord de la ville de Jammu, majoritairement hindoue.

«Quatre jeunes ont été tués dans les tirs et des bâtiments publics ont été attaqués et incendiés par les manifestants en colère», a indiqué Pawan Kotwal, un responsable local.

Ouvrant des discussions à New Delhi entre partis politiques sur l'avenir du Cachemire à l'initiative du gouvernement indien, le premier ministre Manmohan Singh s'est dit «choqué et bouleversé» par les décès, en particulier de jeunes, survenus lors de manifestations et a appelé au calme pour permettre à des pourparlers de résoudre la crise.

Il a accusé «certains groupes» d'orchestrer les incidents, ajoutant qu'un «dialogue significatif ne peut se produire que dans une atmosphère sans violence ni confrontation».

L'une des mesures en discussion pour apaiser la situation serait de lever partiellement l'état d'urgence dans quatre districts du Cachemire, instauré il y a vingt ans et qui accorde l'immunité aux forces de sécurité. Réuni lundi pour en discuter, le gouvernement central n'a pris aucune décision.

Dans le passé, New Delhi a souvent accusé le Pakistan, qui contrôle l'autre partie du Cachemire, d'alimenter les troubles.

Les violences se sont intensifiées ces derniers jours au Cachemire indien. Lundi a été la journée la plus sanglante (18 morts) depuis le début d'un mouvement de protestation en juin contre l'autorité de New Delhi.

Les autorités avaient alors instauré un strict couvre-feu, que plusieurs manifestants ont violé mardi et mercredi, en jetant des pierres sur des policiers.

Sonia Gandhi, présidente du Parti du Congrès indien, a appelé le gouvernement à écouter la jeune génération «qui a grandi dans un climat de violence, de conflit et de brutalité».

La vague de troubles, qui a débuté le 11 juin après la mort d'un étudiant de 17 ans tué par la police pendant une manifestation séparatiste, a fait au moins 92 morts, des civils pour l'essentiel tués par les balles des forces de sécurité indiennes.

La partie indienne du Cachemire est le théâtre d'une insurrection contre l'administration de New Delhi, qui a fait plus de 47.000 morts depuis 1989, selon des chiffres officiels.

Un processus de paix entamé en 2004 avec le Pakistan avait permis d'enrayer les violences avant leur recrudescence au début de l'été.

Environ deux tiers des habitants du Cachemire indien veulent l'indépendance de leur région, et moins d'un sur dix souhaite être rattaché au Pakistan, selon un sondage publié dimanche dernier.

Selon ce sondage effectué pour le Sunday Hindustan Times, 66% des personnes interrogées veulent «la liberté complète du Jammu et Cachemire (qui formerait) un nouveau pays».

Dans le passé, New Delhi a souvent vu dans les violences l'oeuvre en sous-main d'extrémistes pakistanais. Mais de nombreux dirigeants locaux considèrent que le désespoir des jeunes et l'intransigeance de l'Inde ont mis le feu aux poudres. La région himalayenne de 12 millions d'habitants compte environ 400.000 jeunes chômeurs.