Le Pakistan tentait mercredi de juguler la catastrophe humanitaire engendrée par les pires inondations depuis 80 ans, qui ont tué 1500 personnes, en ont affecté plus de 3 millions, et menaçaient de s'étendre à d'autres régions.

Dans le nord-ouest, la région la plus touchée, les survivants affluaient vers les centres de secours, alors que de nouveaux orages étaient attendus, laissant craindre une aggravation de la crise.

Le premier ministre, Yousuf Raza Gilani, a réuni son gouvernement en urgence pour évaluer les dégâts et accélérer les secours, alors que l'ONU et plusieurs pays ont annoncé l'envoi de dizaines de millions de dollars d'aide.

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a également désigné un émissaire pour évaluer la situation, qui devait arriver sur place jeudi.

«Nous avons reçu une réponse encourageante de l'ensemble de la communauté», a déclaré M. Gilani, selon qui «des secours en quantité suffisante» ont été acheminés dans les provinces touchées.

Les précipitations record qui se sont abattues sur le Pakistan depuis la semaine dernière ont dévasté villages et plaines agricoles dans le nord-ouest, région déjà meurtrie depuis plusieurs années par la sanglante rébellion des talibans et les offensives de l'armée.

Selon Nadeem Ahmad, président de l'Autorité pakistanaise de gestion des sinistres, la moitié des sinistrés se trouve dans le nord-ouest et l'autre dans la province centrale du Pendjab, touchée depuis deux jours.

Les inondations menacent dorénavant de s'étendre au Sindh (sud), au Cachemire pakistanais et au Baloutchistan (sud-ouest), selon les autorités.

Selon le gouvernement de la province de Khyber Pakhtunkhwa (nord-ouest), la plus touchée jusqu'ici, 1.500 personnes pourraient avoir péri, tandis qu'un responsable du Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef) a évoqué 3,2 millions de sinistrés.

«Nous avons un besoin urgent d'aide en nourriture pour prévenir une situation de pénurie alimentaire», a indiqué Amjad Jamal, porte-parole du Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations-Unies.

Dans les régions les plus touchées, «80% des réserves alimentaires ont été détruites par les inondations, qui ont également gravement affecté les troupeaux, les marchés, les routes et l'ensemble des infrastructures», a-t-il ajouté.

La route menant de Peshawar à Charsadda offrait ainsi un paysage de désolation, couvert de débris des maisons et d'échoppes rasées comme après un tremblement de terre, a constaté un journaliste de l'AFP.

Dans le village de Shah Alam, quelque 2.000 sinistrés venus réclamer de la nourriture devant la maison d'un responsable local ont dit n'avoir reçu aucune aide. «Je n'ai plus rien. La maison que j'avais construite de mes mains a été détruite. Est-ce que le gouvernement va nous aider ?», se lamentait Falak Naz, 28 ans, encore sous le choc.

De nombreux sinistrés fuyaient les zones inondées, empilant les biens qui leur restaient sur des camions, des voitures ou des ânes. D'autres trouvaient refuge dans des mosquées.

«Nous manquons cruellement de médicaments et de nourriture, et craignons que certains meurent de faim si l'aide n'arrive pas à temps», a souligné le ministre de l'Information de la Khyber Pakhtunkhwa, Mian Iftikhar Hussain.

Des cas de choléra ont été signalés et les autorités redoutent une propagation des maladies. L'ONU a insisté sur la nécessité d'acheminer de l'eau potable le plus vite possible pour éviter ce scénario catastrophe.

La mobilisation internationale s'est intensifiée. Les États-Unis et l'ONU ont chacun annoncé 10 millions de dollars d'aide, la Grande-Bretagne 8 millions, l'Australie 4,4 millions, le Canada 2 millions, la Chine 1,5 million.

La secrétaire d'État Hillary Clinton a promis que les États-Unis aideraient le Pakistan, allié majeur dans la lutte contre le terrorisme, à faire face aux conséquences des inondations.

M. Gilani a indiqué que les membres de son gouvernement allaient donner chacun un mois de salaire pour venir en aide aux sinistrés, et chaque membre de l'armée pakistanaise donnera pour sa part un jour de salaire.

Certaines voix se sont élevées pour reprocher au président Asif Ali Zardari de ne pas avoir interrompu sa tournée en Europe. Il était mercredi à Londres pour une visite qui s'annonçait tendue après que la Grande-Bretagne a accusé la semaine dernière Islamabad d'«exporter le terrorisme»