Le Sri Lanka a accusé vendredi l'ONU de mener «croisade» pour faire comparaître Colombo devant des tribunaux de guerre, après l'annonce par un haut responsable de l'ONU de l'authenticité d'une vidéo montrant des exécutions sommaires de Tamouls par des militaires sri-lankais.

Le rapporteur spécial de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Philip Alston, a affirmé jeudi qu'une vidéo, diffusée en août en Grande-Bretagne, n'était pas un faux comme l'affirme Colombo, exigeant une enquête impartiale pour déterminer si cette vidéo constitue la preuve de crimes de guerre.

La vidéo montre un homme en uniforme militaire tirant dans la nuque d'un homme nu, attaché et les yeux bandés, près d'un champ dans lequel gisent plusieurs corps masculins. Elle aurait été tournée vers la fin des opérations opposant l'armée aux rebelles des Tigres de libération de l'Eelam tamoul (LTTE).

Le ministre sri lankais des droits de l'Homme Mahinda Samarasinghe a déclaré vendredi que M. Alston, n'avait pas suivi «la procédure qu'il aurait dû suivre» en annonçant l'authenticité du document.

«Philip Alston est en croisade pour imposer de force une enquête internationale (pour crimes de guerre) contre le Sri Lanka», a-t-il déclaré à l'AFP. «Nous nous opposons à la procédure qu'il a suivie. Il aurait d'abord dû nous faire part de son information».

Colombo reste persuadé que cette vidéo «n'est pas authentique et qu'elle a été falsifiée», a insisté le ministre.

Le ministre sri lankais des Affaires étrangères, Rohitha Bogollagama, s'est de son côté interrogé sur le moment choisi par Philip Alston pour communiquer sur la vidéo, trois semaines avant les élections présidentielles au Sri Lanka.

M. Bogollagama s'est inquiété que M. Alston mène campagne contre les autorités sri lankaises, «délibérément, au moment coïncidant avec l'actuelle phase sensible des élections nationales».

Le Sri Lanka a toujours rejeté les demandes d'enquête sur la situation des droits de l'Homme, argumentant que rien ne justifie une enquête étant donné que, selon Colombo, il n'y a pas eu de victimes civiles ni d'exécutions extrajudiciaires.

En mai, Colombo avait réussi à échapper à une condamnation du conseil des droits de l'Homme des Nations unies grâce à un soutien de la Chine.

Mais de nouvelles charges ont ressurgi le mois dernier lorsque l'ancien chef des armées et actuel candidat à l'élection présidentielle, Sarath Fonseka, a déclaré que l'armée avait reçu l'ordre d'un haut responsable de la défense d'exécuter des rebelles. L'accusation est fermement démentie par le gouvernement.

En mai, le Sri Lanka a annoncé la défaite de la rébellion séparatiste tamoule, après 37 ans d'une guerre qui a fait entre 80.000 et 100.000 morts.

M. Alston avait noté à l'époque le démenti catégorique par Colombo des allégations relatives à la vidéo mais avait jugé nécessaire l'ouverture d'une enquête. Colombo avait chargé quatre experts sri-lankais, dont deux membres des forces armées, d'enquêter sur le film. Le gouvernement avait ensuite affirmé que leur rapport concluait que la vidéo était «un faux».

M. Alston avait alors mis publiquement en doute l'indépendance et l'impartialité de cette enquête sri-lankaise et avait décidé de faire appel à trois experts indépendants.