L'opposante birmane Aung San Suu Kyi, maintenue en résidence surveillée par la junte, a obtenu l'autorisation de rencontrer mercredi à Rangoun des cadres de la direction de son parti, la Ligue nationale pour la démocratie (LND).

La dissidente, condamnée en août à 18 mois supplémentaires d'assignation à résidence, s'est entretenue pendant 45 minutes avec le président de la LND, Aung Shwe, son secrétaire Lwin et un autre membre du comité exécutif, Lun Tin, tous les trois âgés de plus de 85 ans. «Elle nous a présentés ses hommages (...) et nous a offerts des cadeaux et des fruits», a indiqué Lwin aux journalistes. «Je ne l'avais pas vue depuis 2003», a-t-il ajouté, évoquant la date depuis laquelle Mme Suu Kyi a été constamment privée de liberté par la junte.

Mi-novembre, dans un courrier envoyé aux militaires de Naypyidaw, la figure de proue de l'opposition avait demandé l'autorisation d'aller rendre visite à ses vieux compagnons de combat à leurs domiciles.

Mais elle «a accepté la suggestion des autorités de les rencontrer tous dans un même lieu pour des questions de sécurité», selon le porte-parole de la LND, Nyan Win.

L'opposante avait aussi sollicité dans ce courrier une rencontre avec le généralissime Than Shwe, homme fort de la junte. Officiellement, celui qui n'a jamais caché détester profondément Aung San Suu Kyi n'a pas répondu.

Mais elle «espère que ses autres requêtes seront acceptées (...). Elle pense que le gouvernement va y répondre favorablement», a assuré Nyan Win.

La LND avait triomphé lors des dernières élections organisées en Birmanie, en 1990, mais n'a jamais été autorisée à exercer le pouvoir. La lauréate du prix Nobel de la paix a été de son côté privée de liberté pendant 14 des 20 dernières années.

Le régime militaire a promis d'organiser des élections en 2010. Aucune date n'a cependant été annoncée et le scrutin est suspendu à la promulgation de deux textes de lois dont le contenu est pour l'heure inconnu.

La LND n'a pas encore indiqué si elle entendait y participer ou non. Mais selon Lwin, Aung San Suu Kyi a obtenu mercredi de ses compagnons «l'autorisation de réorganiser le comité exécutif du parti», qui compte onze personnes dont la plupart sont très âgées.

La dernière condamnation de l'opposante, que la Cour suprême va examiner lundi prochain, l'exclut de facto de ces élections.

Elle n'en a pas moins considérablement assoupli sa position. Mme Suu Kyi a repris un début de discussion avec les militaires depuis deux mois, après avoir exprimé publiquement sa volonté d'aider à la levée des sanctions occidentales, qui ont échoué à faire fléchir la junte depuis plus de dix ans.

Elle s'est ainsi entretenue à trois reprises avec le ministre du Travail et officier de liaison du régime, Aung Kyi, dont la semaine passée.

En novembre, l'opposante a aussi fait sa première apparition publique -son procès excepté- depuis 2003, dans un hôtel de Rangoun, accompagnée du secrétaire adjoint américain pour l'Asie de l'Est et le Pacifique, Kurt Campbell, plus haut responsable américain à se rendre en Birmanie depuis 14 ans.

Les États-Unis considèrent désormais qu'une discussion est indispensable pour convaincre le pouvoir de Naypyidaw d'engager des réformes démocratiques. Une stratégie adoptée à son tour le mois dernier par l'Union européenne, qui a décidé d'engager «un dialogue politique soutenu» avec les généraux.