Des heurts entre la police antiémeutes népalaise et des militants maoïstes se sont produits jeudi dans la capitale Katmandou au cours de la plus grande manifestation organisée contre le gouvernement depuis que les maoïstes ont perdu le pouvoir en mai.

Des milliers de militants, scandant des slogans contre le nouveau gouvernement de coalition et arborant des drapeaux rouges, ont bloqué les bâtiments du gouvernement au coeur de Katmandou tôt jeudi matin. La police a évalué le nombre des manifestants à 16000, les maoïstes parlant d'environ 200000.

Les protestataires espéraient mobiliser au moins 300.000 personnes à l'occasion de cette manifestation - prévue jusqu'à vendredi -, la plus grande depuis la démission du premier ministre népalais, l'ex-rebelle maoïste Prachanda.

Selon la police, des heurts ont éclaté lorsque des militants ont voulu forcer les cordons de sécurité interdisant l'accès aux bâtiments gouvernementaux. Les policiers ont fait usage de bâtons et de gaz lacrymogène, a indiqué à l'AFP un commissaire de police, Kanchha Bhandari, précisant qu'il y avait eu quatorze salves de gaz.

La télévision locale a fait état d'un blessé dans les affrontements tandis qu'un responsable maoïste, Barshanan Pun, a évoqué une vingtaine de blessés.

Plus de 2000 policiers antiémeutes ont été déployés dans la capitale et la plupart des membres du gouvernement et des fonctionnaires de l'État ne sont pas venus travailler pour éviter les affrontements.

Mardi, des centaines de militants maoïstes avaient bloqué toutes les routes d'accès à Katmandou, sans provoquer de heurts.

«Le Népal est peut-être devenu une République mais nous devons encore parvenir à un véritable pouvoir populaire», a déclaré à l'AFP un manifestant, Shanchalal Waiba. «Cette manifestation peut provoquer des difficultés pour les gens à court terme mais, à long terme, elle favorisera un avenir meilleur», a-t-il dit.

Les maoïstes ont remporté les élections au Népal en avril 2008, abolissant du même coup la monarchie, mais le gouvernement est tombé huit mois plus tard après la démission fracassante du premier ministre. Ce dernier a invoqué la décision du chef de l'État de maintenir dans ses fonctions le chef de l'armée, pourtant limogé par le gouvernement pour insubordination.

Les anciens guérilleros d'extrême gauche voulaient se débarrasser du général Katawal, un sympathisant royaliste, en raison de son refus d'intégrer à l'armée les 19.000 ex-combattants maoïstes cantonnés dans des camps supervisés par l'ONU.

Les maoïstes, qui se sont engagés dans une sanglante guerre civile contre l'État pendant dix ans au prix de 13000 morts, exigent que le chef de l'État présente des excuses après sa décision qu'ils jugent inconstitutionnelle.

Ils demandent aussi un débat parlementaire sur son rôle.

L'ex-premier ministre, Pushpa Kamal Dahal alias «Prachanda», présent parmi les manifestants, a déclaré à l'AFP que «la suprématie civile» avait été «détournée».

«Le principal objectif de notre rassemblement est de la rétablir et, à moins d'un changement de la part du président, nous continuerons nos manifestations», a-t-il averti.

Un nouveau premier ministre, Madhav Kumar Nepal, chef du Parti communiste du Népal-Marxiste léniniste unifié (PCN-MLU, centre-gauche), dirige depuis la fin mai un fragile gouvernement de coalition boycotté depuis par les maoïstes, qui détiennent 40% des sièges à l'Assemblée constituante.