La Chine a renforcé dimanche sa stratégie africaine en annonçant qu'elle allait accorder 10 milliards de dollars US de prêts bonifiés aux pays d'Afrique, mais aussi en se disant prête à jouer un rôle pour «la paix et la sécurité» sur le continent.

«Nous allons aider l'Afrique à développer ses capacités financières (...). Nous allons fournir dix milliards de dollars à l'Afrique en prêts bonifiés», a déclaré le Premier ministre chinois, Wen Jiabao, à l'ouverture du Forum Chine-Afrique de Charm el-Cheikh (Egypte).

M. Wen a précisé que ces prêts faisaient partie d'une série de mesures qui seraient prises sur les trois années à venir pour renforcer la coopération sino-africaine, évacuant les critiques selon lesquelles le géant asiatique serait uniquement intéressé par l'Afrique pour nourrir les besoins de son économie en pleine croissance.

«Quels que soient les changements sur la scène internationale, notre amitié avec le peuple africain ne changera pas (...), notre politique de soutien à la croissance économique et sociale en Afrique ne changera pas», a promis M. Wen.

Le dirigeant chinois a annoncé que Pékin exempterait de droits de douane 95% des produits «des pays africains les moins développés ayant des relations diplomatiques avec la Chine, en commençant avec 60% des produits dès 2010».

En outre, la Chine «appuiera les institutions financières chinoises pour la mise en place d'un prêt spécial d'un milliard USD pour les petites et moyennes entreprises africaines».

Une cinquantaine de pays participent jusqu'a lundi à la «quatrième conférence ministérielle du Forum de coopération sino-africain» (FCSA, FOCAC en anglais), destinée à développer des relations économiques en plein essor.

Lors de la précédente édition en 2006 à Pékin de cette manifestation triennale, la Chine avait promis d'apporter 5 milliards de dollars d'aide financière à l'Afrique. Pékin a aussi conclu des accords de réduction ou d'annulation de dette avec 31 pays de ce continent.

La Chine s'est de nouveau engagée dimanche à alléger le fardeau de la dette de certains pays africains.

«La Chine est prête à approfondir sa coopération concrète avec l'Afrique», a dit M. Wen, en ajoutant que Pékin était aussi prêt à jouer un rôle «dans le règlement des questions relatives à la paix et à la sécurité».

Il a aussi évoqué le renforcement des relations dans plusieurs autres domaines, comme l'environnement (mise en place de 100 projets liés aux énergies propres, aide à la lutte contre le changement climatique), l'éducation (formation d'enseignants et construction de 50 écoles) et la science.

Selon les statistiques officielles chinoises, les investissements directs chinois sur le continent africain sont passés de 491 millions de dollars en 2003 à 7,8 milliards fin 2008. Les échanges commerciaux entre la Chine et l'Afrique ont quant à eux décuplé depuis le début de la décennie pour atteindre 106,8 mds USD en 2008.

«Néo-colonialisme»

Le Premier ministre chinois, Wen Jiabao, a balayé dimanche les accusations de «néo-colonialisme» adressées à son pays pour sa présence de plus en plus visible et revendiquée en Afrique, assurant vouloir aider le continent à développer ses propres capacités.

«Dire que la Chine est en Afrique pour s'emparer de ses ressources et que la Chine pratique le néo-colonialisme, cela ne date pas d'hier», a déclaré M. Wen lors d'une conférence de presse à Charm el-Cheikh, en Egypte, en marge du Forum sur la coopération Chine-Afrique, auquel participent une cinquantaine de pays.

«Cette thèse ne mérite même pas d'être défendue», a-t-il affirmé.

«Pourquoi concentre-t-on l'attention sur la Chine? Est-ce que ce sont les Africains qui s'en plaignent ou est-ce que ce sont les Occidentaux?», a-t-il lancé.

Pékin est régulièrement accusé de «néo-colonialisme» en Afrique ou de cautionner à coups de milliards des régimes violant les droits de l'Homme afin d'obtenir pétrole et minerais.

La Chine est ainsi l'un des principaux alliés et partenaires économiques du Soudan, dont le président Omar el-Béchir est sous le coup d'un mandat d'arrêt international pour crimes de guerre et contre l'humanité au Darfour.

«La Chine a déjà trop à faire, pour bien régler ses propres problèmes, pour s'immiscer dans les problèmes des autres», a dit M. Wen, en réponse à une question sur le rôle de son pays au Soudan.

Le dirigeant chinois a aussi tenu à souligner l'histoire commune liant la Chine à l'Afrique, estimant que son pays avait une dette envers les pays africains ayant soutenu la République populaire.

«Lors de la période d'indépendance, la Chine a soutenu ces pays dans leur lutte», a-t-il dit. Mais «ce sont nos amis africains qui ont porté la Chine au sein de l'ONU. On n'oublie jamais ce que quelqu'un a fait pour nous».

L'aide à l'Afrique, selon lui, «est une assistance désintéressée et n'est assortie d'aucune condition politique».

Le but de la Chine est d'«aider les pays africains à développer leurs capacités d'autodéveloppement. Nous allons continuer à améliorer nos politiques et à accorder plus d'importance aux formations et au renforcement des capacités», a-t-il conclu.