Les ambassadeurs de huit pays ont appelé vendredi le nouveau gouvernement japonais de centre-gauche à signer un traité international condamnant les enlèvements d'enfants par l'un des parents et reconnaissant le droit de visite.

Les pays associés à cette démarche commune - Australie, Canada, Espagne, États-Unis, France, Grande-Bretagne, Italie et Nouvelle-Zélande - ont tous signé la Convention de La Haye de 1980 sur les aspects civils des déplacements illicites d'enfants. «Le Japon est le seul membre du G7 à ne pas l'avoir signée», a souligné un communiqué conjoint publié après une rencontre des ambassadeurs avec la nouvelle ministre de la Justice, Keiko Chiba.

«Nous avons demandé au Japon d'adhérer à la Convention, indique le communiqué. Nous avons également enjoint le Japon d'identifier et de mettre en oeuvre des mesures permettant aux parents séparés de leurs enfants de maintenir un contact avec eux et de leur rendre visite».

Chaque année au Japon, à la suite d'une séparation ou d'un divorce, 166.000 enfants sont coupés, le plus souvent définitivement, d'un de leurs parents, selon des statistiques officielles.

Dans 80% des cas, c'est le père, japonais ou étranger, qui perd tous ses droits sur l'enfant.

Le communiqué rappelle que la Convention de La Haye, signée par plus de 80 pays, a fixé des procédures pour assurer le retour des enfants dans leur pays de résidence habituelle et pour protéger le droit d'accès des deux parents.

Interrogé par l'AFP, le ministre japonais des Affaires étrangères, Katsuya Okada, a déclaré que le gouvernement était «en train d'examiner la possibilité» de signer cette Convention.

La ministre de la Justice a indiqué pour sa part qu'elle «comprenait le problème», mais qu'elle devait en parler aux autres membres du gouvernement, selon des participants à la rencontre.

La démarche de vendredi était la troisième depuis l'initiative lancée en 2008 par la France lorsqu'elle présidait l'Union européenne.

Selon l'ambassadeur de France, Philippe Faure, 35 cas d'enlèvement d'enfant concernent des Français. «Ce chiffre va certainement augmenter régulièrement, au point de devenir un problème important pour notre gouvernement, nos parlementaires et notre opinion publique», a-t-il dit.

Les États-Unis ont eux été saisis de 82 cas impliquant 123 enfants, et le Canada et la Grande-Bretagne, 35 chacun.

Récemment, un Américain de 38 ans, Christopher Savoie, a été arrêté et détenu pendant près de trois semaines dans le sud-ouest du Japon, après avoir tenté de récupérer ses deux enfants enlevés en août par son ex-femme japonaise.

M. Savoie, qui a été libéré jeudi, avait pourtant obtenu la garde des enfants d'un juge du Tennessee et versé 800.000 dollars à leur mère afin qu'elle puisse rester aux États-Unis et exercer son droit de visite.

«Au nom de quoi a-t-on arrêté et gardé M. Savoie trois semaines en prison alors que c'est la mère qui est hors la loi?», a déclaré à l'AFP Richard Delrieu, président de l'association SOS-Parents-Japan, qui est lui-même privé de son enfant.

Paul Wong, avocat américain qui collabore sur cette question avec le Département d'État, estime que «le Japon est un pays moderne doté d'une loi féodale sur la famille».

«C'est le seul pays qui n'a jamais rendu un enfant à un parent étranger. Jamais», a-t-il déclaré à l'AFP. «C'est une totale discrimination. Comment pouvez-vous prétendre qu'un parent japonais est dans 100% des cas le meilleur parent?»

M. Wong n'a pas vu sa fille depuis deux ans. Après le décès de son ex-femme japonaise d'un cancer, l'enfant a été confiée à ses grands-parents maternels.