Jiang Ye attendait un ami à la gare d'Urumqi lorsqu'elle a ressenti une douleur au bras gauche, une des centaines de victimes des mystérieuses attaques à la seringue à Urumqi, la capitale du Xinjiang musulman, dans l'extrême ouest chinois.

«Cela s'est passé avant-hier, je venais chercher quelqu'un au train et il sortait de la foule lorsque tout d'un coup j'ai ressenti une forte douleur», raconte cette femme han de 36 ans, interrogée à la sortie du service des maladies infectieuses de l'Hôpital populaire du Xinjiang.

«Je n'ai pas vu qui c'était, il tombait des cordes et il faisait noir mais je me souviens qu'il y avait des Ouïghours tout près de moi à ce moment-là», poursuit-elle, faisant référence à l'ethnie majoritaire au Xinjiang, musulmane et turcophone.

En soulevant la manche gauche de son chemisier, elle découvre un hématome de la taille d'une pièce de monnaie avec un trou d'épingle au centre.

«Je suis très inquiète. L'hôpital me dit qu'il n'y a pas de problèmes, mais ils m'ont dit aussi qu'on pouvait avoir des maladies sans le savoir pendant six mois ou un an».

Son mari, He Zeyong, 41 ans, explique avoir participé aux manifestations de jeudi, «de colère» après ce qui est arrivé à sa femme.

«J'ai cru que j'allais mourir de peur», dit-il en se souvenant de ses sentiments lorsqu'elle lui a raconté ce qui lui était arrivé.

«Nous sommes confiants parce que maintenant le gouvernement a pris des mesures pour assurer la sécurité», assure cet homme, qui gère avec sa femme un petit magasin de fruits et légumes.

Selon les médias officiels, 476 personnes se sont rendues à l'hôpital depuis le 20 août afin d'être soignées après de telles attaques, ajoutant que des Ouïghours en avaient également été la cible.

Comme Ahmatjan, 52 ans, qui travaille à l'Université du Xinjiang et a été «piqué» dans le dos jeudi alors qu'il revenait chez lui après le travail.

«C'était un jeune adolescent ouïghour. Cela me fait toujours mal», explique-t-il, alors qu'il porte plainte au commissariat.

Selon l'agence Chine Nouvelle, personne n'a été contaminé ni infecté. Mais on ne sait pas ce que les seringues contenaient, voire si elles étaient remplies d'un quelconque produit.

Le personnel hospitalier a assuré à Ahmatjan qu'il n'y avait rien dans la seringue utilisée par son agresseur, mais cela n'a pas apaisé sa femme, Reyihan, 48 ans.

«Ils disent qu'il n'y a sûrement pas de problème et que nous pourrons soigner s'il y a quelque chose plus tard. Mais que fera-t-on si c'est grave? Il a déjà plus de 50 ans et ne sera pas en mesure de combattre les maladies plus tard», ajoute-t-elle.

«Ces gens peuvent attaquer n'importe qui, même les propres Ouïghours, tout simplement pour créer le chaos dans la société. Mais ils n'arriveront à rien», affirme-t-elle.

Certaines des victimes interrogées estiment que les agresseurs utilisent des seringues car elles sont beaucoup plus faciles à dissimuler que des bâtons ou des armes de fortune depuis que la sécurité a été considérablement renforcée après les émeutes meurtrières de début juillet.

Un Han a même affirmé à l'AFP que des Ouïgours avaient fabriqué des bagues très pointues afin d'attaquer les passants dans la rue sans attirer l'attention.