Un double attentat suicide a tué neuf personnes vendredi dans deux hôtels de luxe de Jakarta, marquant le retour du terrorisme dans le plus grand pays musulman du monde après plusieurs années de calme.

Ces explosions quasi simultanées ont frappé l'hôtel Ritz Carlton et le Marriott, situés dans le quartier des affaires de la capitale indonésienne et fréquentés notamment par des étrangers.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a rejoint la communauté internationale dans sa ferme condamnation du double attentat.

Peu avant 08H00 (21H00 HAE jeudi), un homme a pénétré dans un café du Marriott en se faisant passer, aux yeux de la sécurité, pour «un invité». Il a alors actionné sa bombe qui l'a tué ainsi que six autres personnes, dont un homme d'affaires néo-zélandais participant à un séminaire.

Quelques minutes plus tard, un autre homme, casquette sur la tête et mallette à la main, a agi de la même façon dans la salle de restaurant du Ritz Carlton, où des clients prenaient leur petit-déjeuner. Il a été tué ainsi qu'une autre personne.

Les deux explosions ont également blessé une quarantaine de personnes, dont 14 étrangers, selon la police. Parmi eux, se trouvent huit Américains, a indiqué à un porte-parole du département d'État, Robert Wood.

Une troisième bombe n'ayant pas explosé a été découverte plus tard et désamorcée par la police dans la chambre 1808 du Marriott, a déclaré à l'AFP le conseiller présidentiel Djali Yusuf.

Du matériel pour la fabrication de bombes a également été découvert dans cette chambre qui a servi de quartier général pour l'organisation des attentats, selon les autorités.

Selon la police, les bombes utilisées pour les deux attentats étaient de fabrication artisanale, «identiques» à celles auxquelles avait déjà eu recours le réseau extrémiste islamiste Jemaah Islamiyah (JI ou «Communauté islamique»).

Les auteurs des deux attentats suicide ont laissé des traces d'ADN sur les lieux, où la tête sectionnée de l'un d'eux a été retrouvée.

«Compte tenu des indices, nous avons établi qu'il y avait deux kamikazes», a déclaré à la presse le chef de la police Bambang Hendarso Danuri.

Un responsable des services antiterroristes, qui a requis l'anonymat, a déclaré que les attentats portaient la marque de Noordin Mohammad Top, principal idéologue d'une faction dissidente de la JI, particulièrement redoutable.

«Il doit y avoir un lien avec Noordin Top. C'est une forte possibilité. Mais nous devons encore enquêter pour savoir à quel point il est impliqué», a expliqué ce responsable.

Le porte-parole de la police Nanan Soekarna a cepandant souligné qu'il ne pouvait pas attribuer les attentats à la JI car l'enquête continuait.

«Les responsables de cet acte terroriste» n'ont «aucune humanité», a dénoncé le président indonésien Susilo Bambang Yudhoyono, en s'inquiétant des conséquences «sur l'économie, le tourisme et l'image» de son pays.

L'Indonésie avait réussi, ces dernières années, à ne plus apparaître comme un pays à hauts risques terroristes après avoir porté de rudes coups aux mouvements islamistes clandestins responsables d'une vague d'attentats au début des années 2000.

Le plus meurtrier d'entre eux avait tué 202 personnes, essentiellement des touristes, dans une station balnéaire de Bali en 2002.

Jakarta n'avait plus été visée depuis 2004 où dix personnes avaient été tuées par l'explosion d'une voiture piégée devant l'ambassade d'Australie.

Un an plus tôt, l'hôtel Marriott avait déjà été la cible d'un attentat ayant provoqué la mort de 12 personnes.

Cette série d'attentats avait été attribuée à la Jemaah Islamiyah, un réseau terroriste ayant pour objectif la création d'un État islamique en Asie du Sud-est.

Des centaines d'activistes ou sympathisants ont été arrêtés mais certains de ses leaders restent introuvables, comme Noordin Top, cerveau présumé des attentats du Marriott et de Bali.

Les explosions de vendredi viennent gâcher la célébration de la récente victoire électorale du président Yudhoyono, largement réélu pour un second mandat de cinq ans le 8 juillet.

Cet ancien général, spécialiste des questions de sécurité, est crédité du retour à la stabilité de l'Indonésie, un pays où le recours au terrorisme est extrêmement impopulaire parmi les 235 millions d'habitants, dont une immense majorité pratique un islam modéré.

La communauté internationale a exprimé sa solidarité avec l'Indonésie après le double attentat qui a été qualifié de «révoltant» par le président américain Barack Obama et condamné par le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon.