Une nouvelle série d'attaques mortelles a rallumé les projecteurs sur la plus grande mine d'or au monde, dont l'exploitation reste contestée au coeur de la province troublée de la Papouasie indonésienne.

Deux employés -un Australien et un Indonésien- de l'exploitant américain de la mine, le groupe Freeport McMoRan, ont été tués au cours du week-end par des tireurs inconnus qui restaient introuvables mardi. Une troisième victime, un policier, a été découvert lundi au fond d'un ravin, où il est probablement tombé en tentant d'échapper à une fusillade, selon la police.

 

Ces violences sont les dernières en date à ternir la réputation de la mine de Grasberg, d'où sont extraits à ciel ouvert non seulement de l'or mais aussi du cuivre et de l'argent, valant des milliards de dollars, depuis les années 1970. Située au sud-ouest de la Papouasie, son accès est extrêmement réglementé et rares sont les journalistes étrangers à avoir pu pénétrer dans les quelque 3,6 millions d'hectares de la concession.

 

Depuis son ouverture, la mine «n'a pas cessé d'être un point de fixation» pour les revendications des Papous, souligne Rafendi Djamin, de l'association de défense des droits de l'Homme Human Rights Working Group. Les groupes séparatistes papous, considérés comme mal armés et peu organisés, mènent des actions de guérilla sporadiques visant essentiellement les forces de l'ordre indonésiennes, très présentes en Papouasie. Ils rejettent l'autorité de Jakarta sur leur province et affirment avoir obtenu l'indépendance au départ des colons néerlandais en 1961. Ils accusent en outre les sociétés étrangères exploitant les énormes ressources naturelles de ne pas suffisamment rétribuer les Papous, qui demeurent l'un des peuples les plus pauvres d'Indonésie.

 

Freeport fait en revanche l'objet de toutes les attentions du gouvernement indonésien, pour qui le groupe américain est d'abord le premier contribuable du pays. «Il est difficile de spéculer sur les attaques du week-end dernier. Mais une chose est sûre: elles s'inscrivent dans la vague de violence qui touche la Papouasie depuis six mois», estime M. Djamin.

 

Ces dernières attaques, qui n'ont pas été revendiquées, «ont vraisemblablement un caractère politique, mais nous ne savons pas de quel bord», ajoute-t-il.

 

En 2002, deux instituteurs américains et un collègue indonésien travaillant pour la mine avaient déjà été tués dans une embuscade. Les enquêteurs avaient conclu qu'un mouvement séparatiste était responsable de l'attaque mais certaines associations locales ont mis en cause l'armée.

 

Un article publié par la revue South East Asia Research a affirmé qu'un accord avait été conclu entre les autorités indonésiennes et les enquêteurs américains pour étouffer l'implication de l'armée dans ces morts.

 

Située à proximité des plus hauts sommets d'Asie du Sud-est, la mine de Grasberg est par ailleurs très critiquée par des ONG écologistes pour les destructions qu'elle occasionne et la forte contamination des cours d'eau qui descendent vers l'océan. Pour se défendre, Freeport met en exergue ses programmes sociaux dans la région et la part croissante de revenus versée aux Papous en vertu de nouvelles lois indonésiennes accordant une plus grande autonomie à l'immense province.