Le président pakistanais Asif Ali Zardari a demandé mercredi un soutien de l'Union européenne à l'économie de son pays, afin d'endiguer la pauvreté, l'extrémisme et le terrorisme, au cours d'un sommet sans précédent entre l'UE et le Pakistan.

L'armée pakistanaise est engagée depuis fin avril dans une offensive majeure contre les talibans dans la vallée de Swat, qui pourrait se poursuivre dans les zones tribales du Nord-Ouest.«Avec l'aide du monde, nous allons gagner, et la moitié de la guerre c'est (conquérir) les coeurs et les esprits des gens», a déclaré M. Zardari, qui avant le sommet avec l'Union européenne avait rencontré des responsables de l'OTAN.

Des ONG comme Oxfam ou Action Aid ne cessent de dénoncer l'insuffisance de fonds dégagés pour aider les quelque 2,5 millions de personnes qui ont été déplacées depuis le début de l'offensive de l'armée, selon l'ONU.

L'afflux de réfugiés en situation précaire risque de favoriser les organisations extrémistes, qui sont présentes pour aider une population dans le besoin, selon les ONG.

Face à cette situation, M. Zardari n'a cependant pas demandé davantage d'aide humanitaire, mais des marchés européens plus ouverts aux produits pakistanais.

«Nous avons besoin de commerce, pas d'aide. Nous voulons des +MOUs+ (memorandums of understanding ou accords de principe), pas des +IOUs+ (promesses d'argent), et j'ai bien l'intention de les obtenir», a-t-il insisté.

La Commission européenne a annoncé malgré tout une nouvelle aide humanitaire de 65 millions d'euros pour les réfugiés du Swat, en plus des 485 millions d'euros pour le développement promis à la conférence des donateurs de Tokyo en avril.

Mais «nous ferons plus aussi côté commerce», a promis la commissaire aux Relations extérieures, Benita Ferrero-Waldner.

L'UE s'est ainsi engagée à examiner la possibilité d'ajouter le Pakistan à la liste des pays en développement bénéficiant du «système des préférences généralisées plus» (SPG+), régime commercial qui accorde des préférences douanières en échange du respect de certains principes dans les domaines de l'environnement et du droit du travail notamment.

Les Européens vont également engager un dialogue commercial avec Islamabad qui pourrait déboucher sur un accord de libre-échange (ALE).

«Nous sommes prêts à soutenir le Pakistan pour relever les défis et se préparer à de possibles négociations» sur un tel accord, a assuré le président de la Commission José Manuel Barroso, tout en précisant ne pas pouvoir «s'engager» sur une date.

«Je suis confiant dans le fait que nous obtiendrons le soutien pour le SPG, pour l'ALE. Toutes ces questions sont importantes pour conforter la démocratie et rendre le Pakistan plus fort», a plaidé M. Zardari à l'issue du sommet.

«Apporter stabilité économique et développement au Pakistan est vital pour s'attaquer aux racines de la pauvreté et du conflit», a également reconnu le diplomate en chef de l'UE, Javier Solana, dans une tribune au journal pakistanais Dawn.com mercredi.

L'UE a aussi soutenu l'offensive militaire en cours, qui doit contribuer, selon elle, à «la prospérité du peuple pakistanais et renforcer le gouvernement démocratiquement élu pour atteindre ses objectifs politiques et de développement».

Mais les Européens attendent aussi des engagements en retour.

«En échange, nous voulons que le Pakistan prenne la lutte contre le terrorisme très au sérieux», a insisté Mme Ferrero-Waldner. «Et qu'il fasse aussi beaucoup sur le front intérieur, c'est-à-dire les questions de bonne gouvernance et l'éducation».

Amnesty international a d'ailleurs appelé l'UE à insister pour que la lutte contre le terrorisme ne se fasse pas au détriment de «la protection des droits de l'homme (qui doit être) le fondement pour le renforcement des relations UE-Pakistan».