L'opposante birmane Aung San Suu Kyi a clamé son innocence vendredi devant le tribunal qui la juge à huis clos dans la prison d'Insein, au nord de Rangoon, a annoncé un porte-parole de sa formation politique, qui fait partie de son équipe de défense.

«Je ne suis pas coupable, étant donné que je n'ai commis aucun crime», a déclaré la lauréate du prix Nobel de la paix, selon le porte-parole et avocat Nyan Win qui rendait compte de l'audience de vendredi, cinquième jour d'un procès qui a suscité une vive indignation internationale et de violentes critiques occidentales contre les généraux au pouvoir.

Mme Suu Kyi, 63 ans, est jugée pour avoir, selon les autorités birmanes, enfreint les règles de son assignation à résidence en hébergeant pendant deux jours début mai l'Américain John Yettaw, mormon excentrique de 53 ans qui a réussi à nager jusqu'à la demeure de l'opposante, située en bordure d'un lac.

La dirigeante de la Ligue nationale pour la démocratie (LND), qui a été privée de liberté pendant plus de 13 des 19 dernières années, a clamé son innocence en réponse à la question d'un juge qui lui demandait si elle était coupable.

Les deux derniers des 23 témoins de l'accusation - un policier et un officier de l'Immigration - venaient de comparaître. Presque tous les témoins de l'accusation, appelés à la barre jusqu'à présent, étaient des policiers.

L'accusation a présenté suffisamment d'éléments pour que le tribunal accepte les charges contre Mme Suu Kyi, contre ses deux assistantes qui vivaient avec elle et contre M. Yettaw, a déclaré Nyan Win. La défense présentera ses arguments à partir de lundi, a-t-il précisé. «Nous gagnerons cette affaire en vertu de la loi», a encore dit le porte-parole.

Les quatre accusés sont passibles de cinq ans de prison.

Selon Nyan Win, Mme Suu Kyi a déclaré en privé à son équipe d'avocats que toute cette affaire était le résultat d'une défaillance de la sécurité autour de sa résidence.

«Elle a dit qu'elle n'était pas coupable et que la principale raison de l'entrée de cet homme dans la demeure était la défaillance de la sécurité», a expliqué le porte-parole.

«Elle nous a dit qu'elle voulait porter seule la responsabilité. Elle a accepté cette personne (chez elle) pour deux raisons : la première est humanitaire et la seconde réside dans le fait que, politiquement, elle ne veut pas mettre en difficulté d'autres personnes», a-t-il ajouté.

Avant le début du procès, l'équipe de défense de Mme Suu Kyi avait qualifié John Yettaw «d'aventurier» et «d'imbécile». Un avocat, Kyi Win, avait affirmé que Mme Suu Kyi «avait eu pitié de cet homme car il avait des crampes aux jambes après avoir traversé le lac».

Plus tôt vendredi, la Birmanie avait accusé des «éléments anti-gouvernementaux» d'avoir orchestré la venue de John Yettaw chez Aung San Suu Kyi. Le consul général birman à Hong Kong, Ye Myint Aung, était allé jusqu'à se demander si le visiteur américain était un «agent secret» ou son «petit ami».

Le ministre birman des Affaires étrangères Nyan Win a affirmé que l'incident Yettaw/Suu Kyi aurait été provoqué par l'opposition, et non par le gouvernement, alors que la Birmanie «essaie d'améliorer ses relations à travers le monde, y compris avec les Etats-Unis, le Japon et les nations européennes».

Le ministre a estimé «probable que cet incident ait été monté de toutes pièces de manière opportune par des éléments anti-gouvernementaux internes et externes pour accroître la pression internationale sur la Birmanie».