Les élections indiennes - carrément le plus gros exercice démocratique de l'histoire - ont pris fin hier. Mais bien malin qui peut prédire l'issue de cette course extrêmement serrée. Alors que les derniers électeurs indiens ont fait la file sous un soleil de plomb, l'actuel premier ministre, Manhoman Singh, mise encore et toujours sur la carte de la modération pour garder son siège.

Dans la cour d'école du village de Pothinayanapalli, dans le sud de l'Inde, les vaches sacrées aux cornes décorées côtoient les chèvres et les enfants qui jouent pieds nus dans le sable brûlant.

Mais hier, l'endroit était aussi plein d'adultes qui attendaient sous un soleil de plomb pour participer à la toute dernière étape du plus grand exercice démocratique que la planète n'ait jamais connu: les 15es élections législatives de l'Inde.

Le marathon électoral que court l'Inde depuis un mois est maintenant terminé. Les 714 millions d'Indiens inscrits à la liste électorale ont pu voter en cinq phases. Le verdict final? Il est attendu pour samedi.

Les sondages montrent que la course est extrêmement serrée. Il est prévu qu'aucune formation ne remportera de majorité, si bien que les partis devront former des alliances pour gouverner.

Le dernier coup de sonde du Times of India donne 152 sièges au Parti du Congrès de Sonia Gandhi et de l'actuel premier ministre, Manmohan Singh, contre 145 pour son principal adversaire, le parti nationaliste hindou - le Bharatiya Janata Party, ou BJP.

En ajoutant les alliés sûrs de chacun des camps, le sondage donne 195 sièges à une alliance dirigée par le Congrès, contre 187 à celle dirigée par le BJP. La «Troisième Voie», une nouvelle coalition qui regroupe une pléiade de partis de gauche et de partis régionaux qui ne trouvent pas leur compte au sein des deux coalitions principales, récolterait quant à elle 111 sièges.

Dans tous les cas, personne n'atteint le chiffre magique de 272, la clé pour obtenir la majorité de la Chambre basse du Parlement indien. De nouvelles alliances devront donc être formées; tractations et négociations postélectorales en vue.

Tensions aux bureaux de vote

Cette tension s'est reflétée hier dans le village de 4000 âmes de Pothinayanapalli.

Installés à l'ombre des arbres, une cinquantaine de partisans portant des foulards aux couleurs de différentes formations ont passé la journée à confronter leurs opinions. Le ton a monté plus d'une fois et on a vu un peu de bousculade. Rien de bien sérieux, mais six policiers armés de fusils et de bâtons sont tout de même arrivés en jeep pour calmer le jeu.

Des violences plus sérieuses ont fait un mort à Kolkata (Calcutta) et des incidents ont aussi été rapportés à Chennai.

Il faut dire que Pothinayanapalli et Chennai sont situés au Tamil Nadu. Cet État à majorité tamoule ressent les effets de la situation au Sri Lanka, où les Tigres de libération de l'Eelam tamoul ont été poussés dans leurs derniers retranchements par les forces du pays.

Plusieurs analystes croient aussi que l'issue du scrutin de l'Inde se décidera au Tamil Nadu, où la politique est dominée par les partis régionaux. Les cinq derniers gouvernements de l'Inde ont été formés avec l'appui des gagnants de l'État.

Ces considérations ne semblent toutefois pas avoir influencé Ravi Ganabathi, 26 ans. Après avoir fait la file, le jeune homme a tendu son index à une vieille femme en sari, qui l'a marqué d'encre pour s'assurer qu'il ne vote pas deux fois.

Un long «bip» a résonné quand M. Ganabathi a appuyé sur l'une des 16 touches de la machine électronique qui a enregistré son vote.

Laquelle? L'homme a confié avoir donné son vote à une star bollywoodienne d'origine tamoule.

«Je l'aime beaucoup», a expliqué le jeune homme en baissant les yeux.

Les élections indiennes en chiffres

543 sièges à pourvoir

> 714 millions d'électeurs

> 1055 partis politiques

> 1 368 430 machines à voter électroniques

> 6,1 millions de policiers et de superviseurs civils en service

- Avec BBC, Outlook, Times of India