L'offensive lancée cette semaine contre les talibans de Swat, dans le nord-ouest du Pakistan, a permis mercredi à l'armée de reprendre une ville-clé, et a été chaudement saluée par Washington, qui reprochait à Islamabad d'«abdiquer» face à ces islamistes liés à Al-Qaïda.

L'armée avait lancé mardi une vaste contre-attaque à Buner, à une centaine de km seulement d'Islamabad, dont les talibans du district voisin de Swat s'étaient emparés la semaine dernière en profitant d'un accord de cessez-le-feu qualifié d'«abdication» par Washington.

«Mercredi matin, des troupes héliportées ont réussi à sécuriser Dagar, chef-lieu du district de Buner, et ses environs», a annoncé un porte-parole de l'armée.

Selon lui, les militaires ont tué plus de 50 talibans et perdu un seul homme en deux jours, mais ces chiffres ne sont pas vérifiables de sources indépendantes.

Avec une première contre-attaque dimanche dans le district voisin du Lower Dir, l'armée s'est engagée cette semaine dans une offensive sur plusieurs fronts pour repousser les talibans de la vallée de Swat.

Et ce, pour la première fois depuis la signature mi-février de l'accord très controversé au terme duquel les talibans cessaient le feu en échange de l'instauration de tribunaux islamiques dans la région de Malakand, qui comprend notamment Swat, Buner et le Lower Dir.

Mardi, les Etats-Unis, dont Islamabad est l'allié-clé dans leur «guerre contre le terrorisme», se sont réjouis de l'offensive de Buner et Lower Dir.

La chute de Buner aux mains des talibans avait réveillé une opinion publique jusque alors apathique, qui avait dénoncé la «capitulation» du gouvernement et de l'armée. Elle avait aussi provoqué les foudres de Washington.

Grâce au soutien des talibans pakistanais, Al-Qaïda a reconstitué depuis plusieurs années ses forces dans les zones tribales du nord-ouest du Pakistan, frontalières avec l'Afghanistan, et les talibans afghans leurs bases arrières.

Mais les talibans pakistanais avaient progressé ensuite hors des zones tribales en s'emparant à l'été 2007 de la vallée de Swat, jusqu'alors le site le plus touristique du pays. L'armée avait tenté en vain de les en déloger.

Mi-février, face aux exactions commises à Swat par les combattants islamistes qui décapitaient le moindre opposant et détruisaient les écoles accueillant des filles, le gouvernement provincial avait signé l'accord de cessez-le-feu en échange des tribunaux islamiques.

Depuis, loin de déposer les armes comme le leur imposait l'accord, les talibans avaient profité du retrait de l'armée pour pousser leur avantage sur le terrain au-delà de Swat, jusqu'à Buner.

La secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, avait accusé Islamabad d'«abdiquer» et s'était émue de l'«avancée» de ces talibans, «une menace mortelle» pour le Pakistan et, par voie de conséquence, pour le monde.

«Les opérations militaires en cours dans les districts de Buner et de Dir sont une réponse parfaitement adéquate aux offensives des talibans ces dernières semaines», a jugé mardi le porte-parole du Pentagone, Geoff Morrell.

Quant aux talibans, ils assurent «résister» à l'armée. «Pour notre part, nous considérons l'accord comme toujours valide mais s'il est déclaré caduc» par le leader religieux qui l'a négocié avec le gouvernement mi-février, «alors nous reprendrons le jihad contre le gouvernement», a déclaré mercredi au téléphone à l'AFP Muslim Khan, le porte-parole des talibans de Swat.

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