Indiens et Occidentaux, tous étaient sous le choc jeudi à Bombay où, après une nuit de terreur, le cauchemar se poursuivait. Des otages étaient encore retenus dans deux hôtels de luxe, dont l'un au moins était en flammes. Les habitants ont reçu pour instruction de rester à l'abri chez eux; les écoles et universités étaient fermées.

Certains rescapés commençaient à livrer leur témoignage.

«Nous étions en train de dîner lorsque nous avons entendu des tirs. Il y avait des coups de coups de feu et des explosions», raconte Cheryl Robinson, une touriste britannique qui se trouvait mercredi soir à l'hôtel Taj Mahal avec deux amis. «Nous sommes restés par terre. Beaucoup étaient allongés sous des tables, sous des meubles. Et le personnel de l'hôtel nous a dit de ne pas faire de bruit».

«Les employés de l'hôtel ont été fantastiques. Ils ont fermé les portes à clef et nous ont conseillé de ne pas bouger», explique-t-elle encore. Des restaurants et des chambres ont été inondés, sans doute après qu'une balle ou une explosion eurent rompu un tuyau. «Nous sommes restés allongés dans l'eau. Nous entendions des gens courir dehors. C'était terrifiant».

Ce n'est que sept heures plus tard que Cheryl Robinson a pu fuir l'hôtel, pieds nus, grelottante. Des soldats et des pompiers l'ont aidée, elle et plusieurs autres, à descendre les échelles-incendie du majestueux édifice en flammes. Des fumées noires s'élevaient jeudi encore des fenêtres brisées du Taj Mahal.

D'autres touristes, originaires d'Espagne, d'Italie et de Grande-Bretagne, restaient groupés, en larmes, tenant les journalistes à l'écart.

Dalbir Bains, qui tient une boutique de lingerie, raconte comment elle a échappé au carnage. Elle venait de s'asseoir au bord de la piscine pour dîner lorsqu'elle a entendu les premiers coups de feu. Elle a couru à l'étage, se réfugiant sous une table du restaurant Sea Lounge. Elle et une cinquantaine d'autres personnes qui s'y trouvaient également ont tenté de rester aussi discrètes que possible.

«Les coups de feu nous suivaient», se souvient-elle. Six heures plus tard, vers 4h du matin, les autorités ont commencé à évacuer certaines personnes de l'hôtel. C'est à ce moment-là que Dalbir Bains a pu gagner l'extérieur en emprunté une échelle incendie.

Une poignée de gens avaient réussi à s'enfuir auparavant, aidés par des gardes de sécurité qui dînaient par hasard à l'hôtel. Cinq par cinq, ils ont descendu plus de 20 étages. Nombre d'entre eux avaient retiré leurs chaussures pour faire moins de bruit.

L'escalier en spirale est abrupt et étroit. La descente a pris environ une demi-heure, rapporte Manrico Iachia, le vice-président exécutif italien d'Europ Assistance. Deux hommes ont porté une femme en fauteuil roulant. «Le plus important, c'est de ne pas être blessé», a-t-il simplement commenté.

On ignorait combien d'otages étaient encore retenus à l'intérieur de l'hôtel jeudi. Jusqu'à 15 étrangers pourraient se trouver parmi eux, selon les autorités locales.

De l'extérieur, on apercevait dans les chambres les silhouettes de gens, apparemment bloqués par l'incendie. Certains allumaient et éteignaient la lumière en signe de détresse. Un couple agitait un drapeau blanc, l'homme et la femme se relayant à la fenêtre.

Dans la Taj Tower voisine, environ 200 personnes se sont cachées pendant cinq heures dans une salle de conférences au sommet de la tour, rapportent des témoins. Ils ont tiré les rideaux et sont restés sous les tables, les femmes urinant dans des seaux à glace.

Nasim Inam a survécu pour sa part à l'attentat de la gare Chattrapati Shivaji Terminus. Ses mains tremblent encore lorsqu'il raconte la scène.

Quatre hommes jeunes, vêtus d'un jean et d'un T-shirt noir, ont ouvert le feu sur les passagers qui attendaient sur le quai. «Ils ont tiré sur les gens au hasard et ils sont ensuite partis en courant», explique-t-il. «Ils étaient jeunes», précise-t-il, jugeant qu'ils ne devaient pas avoir plus de 25 ans. «J'étais juste derrière eux. S'ils s'étaient retournés, ç'aurait été moi».

A quelques kilomètres de là, des témoins rapportent que des assaillants ont détourné une camionnette de police et ont ouvert le feu sur la foule qui s'étaient massée près de deux hôpitaux. «Nous avons entendu une voiture foncer vers nous. C'était une camionnette de police mais les hommes à l'intérieur nous tiraient dessus», raconte Manish Tripathi.

«Des hommes hurlaient qu'ils avaient perdu leurs doigts. Il y avait du sang partout», se souvient ce rescapé. «Certains ont reçu une balle dans la jambe, à l'épaule ou à la main. Je les entends encore crier».