Le général David Petraeus, nouveau chef des opérations américaines en Afghanistan et en Irak, a réservé lundi sa première visite dans la région au Pakistan, témoignant des inquiétudes de Washington face à la montée des violences islamistes dans ce pays.

Cette visite, qui devait donner lieu à un examen de la stratégie des États-Unis en Afghanistan et dans les zones tribales pakistanaises, «démontre l'importance du Pakistan dans la +guerre contre le terrorisme+», a souligné Talat Masood, général à la retraite et expert dans les questions de sécurité.

Les relations entre les deux pays, alliés dans la lutte menée notamment sur le front afghan depuis les attentats du 11 septembre 2001, se sont tendues récemment en raison d'une série de frappes américaines contre des repaires d'insurgés dans le nord-ouest du Pakistan, frontalier de l'Afghanistan.

Islamabad dénonce ces frappes en affirmant qu'elles portent préjudice à ses efforts pour combattre l'extrémisme.

Une nouvelle protestation a été adressée lundi au général Petraeus lors d'un entretien avec le ministre pakistanais de la Défense, Chaudhry Ahmad Mukhtar, avertissant que les tirs de missiles risquent de «générer des sentiments anti-américains et provoquer une vague de violence parmi la population».

Le général Petraeus, 55 ans, fort de ses succès en matière de contre-insurrection en Irak, a pris ses fonctions vendredi à la tête du commandement américain pour le Moyen-Orient et l'Asie centrale, avant de partir pour le Pakistan où il a rencontré les dirigeants civils et militaires du pays.

Il devait ensuite se rendre en Afghanistan, selon la presse.

Cette visite «démontre que le Pakistan est devenu un point d'intérêt central pour les États-Unis», a souligné Talat Masood.

Les zones peuplées de tribus pachtounes du Nord-Ouest du Pakistan, qui longent la frontière afghane, sont en effet devenues, selon de nombreux experts, «le nouveau front» de la guerre contre le terrorisme, où se sont repliés des talibans afghans chassés de leur pays depuis 2001 et d'autres insurgés liés au réseau Al-Qaeda, avec le soutien de talibans pakistanais.

Washington et Kaboul affirment que ces groupes lancent depuis ces régions des attaques contre les forces internationales en Afghanistan, et accusent Islamabad de ne pas lutter assez activement contre les insurgés.

Mais les tirs de missiles - 18 frappes depuis le 13 août - menés par des drones, que les forces américaines en Afghanistan sont seules à posséder dans la région, semblent sans effet sur les violences qui secouent le Pakistan.

Dimanche encore, huit soldats ont été tués par un kamikaze dans le Nord-Ouest, deux jours après deux nouvelles frappes qui avaient tué 32 insurgés, selon des responsables pakistanais, dans les régions tribales.

La nomination du général Petraeus, a relevé Talat Masood, «est un signe avant-coureur du sentiment aux États-Unis que ce pays ne gagne pas la guerre en Afghanistan».

L'intensification des violences en Afghanistan a déjà conduit la Maison-Blanche et l'armée américaine à se lancer dans un examen de la stratégie à appliquer dans cette région, englobant l'extrémisme au Pakistan et l'insurrection dans les zones tribales.

Les deux candidats à l'élection présidentielle américaine de mardi, Barack Obama et John McCain, ont par avance souscrit à l'envoi de soldats supplémentaires sur le front afghan, actuellement au nombre de 33.000, la moitié des troupes étrangères dans ce pays.

Parallèlement, l'idée d'un dialogue, aux contours encore très imprécis, avec les talibans, semble faire du chemin.

Le général Petraeus a d'ailleurs publiquement soutenu l'idée de «parler à l'ennemi» au nom de la réconciliation et aime à insister sur l'importance des efforts politiques et économiques pour vaincre une insurrection.