Secouristes, militaires et policiers s'efforçaient inlassablement vendredi de retrouver des survivants du séisme qui a fait au moins 90 morts et plus de 200 blessés dans le sud du Mexique.

L'épicentre du plus fort tremblement de terre survenu dans ce pays en un siècle, d'une magnitude de 8,2, était situé dans le Pacifique, à environ 100 kilomètres au large de la localité de Tonala, sur la côte de l'État du Chiapas, selon le centre géologique américain USGS.

Mais c'est l'État d'Oaxaca (sud) qui a été le plus affecté par cette secousse, avec 46 morts, dont au moins 17 pour la seule localité de Juchitan, où des victimes pourraient être toujours coincées sous les édifices effondrés.

Voitures ensevelies sous les gravats, pans de murs renversés, morceaux de verre ou de bois jonchant les rues: cette localité de 100 000 habitants, entourée de montagnes recouvertes de végétation tropicale, était défigurée vendredi.

Près de la mairie très fortement endommagée, aux arches coloniales colorées, des militaires et des policiers tentent toujours de retrouver des survivants parmi les monceaux de gravats, dans un silence pesant.

«On fait tout ce qu'on peut pour sortir notre compagnon. Ils étaient deux là-dessous, nous en avons sauvé un», a raconté à l'AFP un policier municipal à l'uniforme couvert de poussière, tandis que ses collègues continuaient à creuser avec des pelles.

«La ville est ravagée»

«Dieu fasse qu'il sorte vivant!»: une femme de l'ethnie zapotèque exprime son soutien, à quelques mètres de là, alors qu'à travers la localité quatre engins de chantier et des camions sont utilisés pour dégager les décombres.

«Personne ne s'attendait à ça, et pour cette raison ils ne sont pas sortis rapidement et ont été ensevelis», commente abasourdi Vidal Vera, un policier municipal de 29 ans.

«Je n'ai pas le souvenir d'un séisme aussi affreux», poursuit-il, «la ville est ravagée».

Dans la matinée, un habitant était venu retirer des décombres le drapeau mexicain, pour ensuite l'agiter avec fierté, une image devenue virale sur les réseaux sociaux.

Le président mexicain Enrique Peña Nieto a parcouru en hélicoptère les zones affectées de l'État d'Oaxaca, dont Juchitan, où il a écouté dans l'après-midi les récits des habitants avant de se rendre au Chiapas.

À Matias Romero, toujours dans l'État d'Oaxaca, l'hôtel Sensation s'est complètement affaissé sur un côté, pour s'immobiliser dans une position incongrue et périlleuse.

«C'est le plus grand tremblement de terre de l'histoire du Mexique, mais nous sommes là, Oaxaca est debout», a assuré le gouverneur de l'Etat, Alejandro Murat, sur une radio locale, précisant que l'armée avait déployé plus de 1000 hommes dans la région.

Des vivres et des milliers de matelas et couvertures «sont en cours d'acheminement», a promis le gouverneur aux habitants affectés par la tragédie.

Plus de 260 répliques

Plus de 260 répliques du séisme ont été enregistrées dans la journée, a indiqué le président mexicain sur Twitter, tout en soulignant que les aéroports et les ports fonctionnaient normalement.

Le pape François, en visite en Colombie, a appelé à une prière «pour ceux qui souffrent des conséquences du tremblement de terre» et pour les victimes de ce séisme ainsi que celles de l'ouragan Irma, qui dévaste au même moment les Caraïbes.

La capitale mexicaine a également fortement ressenti cette secousse et de nombreux habitants se sont même précipités dans la rue, après le déclenchement de l'alerte sismique annonçant l'imminence d'un puissant tremblement de terre.

«Pas encore un (séisme)! Dieu, s'il te plaît, non», a ainsi crié une femme en tombant à genoux pour prier en pleine rue.

Selon le président Peña Nieto, 50 millions de personnes sur les 120 millions que compte le pays ont ressenti la secousse.

En septembre 1985, un séisme de magnitude 8,1 avait dévasté une grande partie de la capitale et fait plus de 10 000 morts.

Régulièrement accablé par les catastrophes naturelles, le Mexique a été touché vendredi soir par l'ouragan Katia, rétrogradé en catégorie 1, par le Centre américain des ouragans (NHC). L'ouragan a frappé vers 03h00 GMT l'État de Veracruz (est) au nord de la localité de Tecolutla avec des vents de 120 km/h. Et là ce sont des glissements de terrain meurtriers qui sont craints dans cette région montagneuse.

PHOTO AFPTV, Oscar GARCIA / AFP

Image tirée d'une vidéo de la chaîne AFPTV montrant des dommages causés par le séisme dans la ville d'Oaxaca, située dans l'État du même nom.

PHOTO Luis Alberto Cruz, AP

Plus de 200 personnes ont été blessées par les importantes secousses sismiques.

Témoignages

À Mexico, lorsque l'alarme a retenti pour annoncer l'imminence d'un tremblement de terre, plusieurs Mexicains se demandaient s'il y aurait bel et bien une secousse, raconte Diego Rodriguez, résidant de la capitale. «C'est que dans la nuit de mercredi, nous avions eu une fausse alarme. Le gouvernement s'est même excusé par la suite, raconte le jeune homme âgé de 29 ans. Donc on se demandait si c'était encore le cas cette fois-ci.» 

Mais dans la nuit du jeudi au vendredi, la menace était bien réelle. La terre a commencé à trembler quelque 30 secondes après que l'alerte ait été donnée vers 23h48. Les gens sont donc tous sortis dans la rue. La secousse s'est toutefois beaucoup moins fait sentir qu'ailleurs au pays. Quelques citadins, parmi les plus vieux, se sentaient nerveux, car ils craignaient de revivre le terrible tremblement de terre survenu dans la ville en 1985. «Les plus jeunes ne semblaient pas trop s'inquiéter, ajoute Diego Rodriguez. Nous sommes restés dehors environ cinq minutes. Comme il faisait froid, tout le monde s'est dépêché à rentrer.»

Vendredi matin, tout fonctionnait normalement dans la capitale. 

Valeria Fillio, une étudiante qui vit à Mexico, dit avoir eu très peur de son côté. La jeune femme habite au quatrième étage d'un immeuble situé dans le quartier Reforma. «J'étais déjà endormie depuis 22h et je n'ai pas entendu l'alarme. Ce sont les mouvements des objets qui m'ont réveillé. Je ne trouvais pas la clé pour sortir de chez moi et j'ai commencé à pleurer et à trembler.»

Selon Mme Fillio, plusieurs personnes ont raconté sur Facebook à quel point le tremblement de terre les avaient effrayés. «Mais ce sont les personnes plus âgées qui ont le plus peur, car ils se rappelaient de leur expérience d'il y a quelques années», lors du séisme de 1985.

« J'ai eu peur comme jamais auparavant », affirme Laurence Du Sault, une jeune Québécoise de 24 ans qui se trouvait dans une chambre d'hôtel à San Cristobal de las Casas, une ville située dans la région des Chiapas, au sud du Mexique, au moment du séisme. « Je me suis levée de mon lit, mais je perdais l'équilibre. Je me suis mise à marcher les genoux pliés pour garder l'équilibre et je me suis réfugiée sous le cadre de porte. » Le tremblement de terre aurait fait trois victimes dans la ville. Un peu partout dans les rues, des morceaux de murs de certains édifices se sont écroulés. La jeune femme dit avoir été particulièrement impressionnée par le sang-froid des Mexicains. « Il y avait un calme et un sentiment d'entraide au moment du séisme. Personne ne criait, tout le monde attendait patiemment les informations. J'ai été surprise par la manière dont la ville a répondu [au séisme]. C'était très calme et rapide. Ça m'a rassuré. »

- Nathaëlle Morissette et Éric-Pierre Champagne, La Presse

En chiffres

Le tremblement de terre le plus meurtrier :

Haïti (2010) : magnitude 7

240 000 morts

Les tremblements de terre les plus puissants :

- Chili (1960) : magnitude 9,5

Plus de 5700 morts

- Alaska (1964) : magnitude 9,2

Une centaine de morts

- Asie (décembre 2004) : magnitude 9,1

Le tsunami provoqué par le tremblement de terre a fait 227 000 victimes.

- URSS (1952) : magnitude 9

2300 victimes

- Équateur (1908) : magnitude 8,8

Un séisme au large des côtes de l'Équateur et de la Colombie provoque un tsunami qui fait plus d'un millier de victimes

- Chili (2010) : magnitude 8,8

Le tsunami provoqué par le séisme fait plus de 500 victimes.

 - Éric-Pierre Champagne