Un adolescent est mort mercredi à Caracas où plusieurs milliers de personnes ont à nouveau manifesté pour exiger le départ du président Nicolas Maduro, tandis que le chef des armées a lancé un appel inédit à ses troupes à cesser les «atrocités».

L'adolescent, âgé de 17 ans, a été tué à Chacao, un quartier de l'est de la capitale, selon le parquet, portant à 66 le nombre de morts en plus de deux mois de protestations de l'opposition.

Sur une vidéo circulant dans les réseaux sociaux, on pouvait voir l'adolescent ensanglanté par une importante blessure à la poitrine, écroulé sur l'avenue Libertador.

Les dirigeants de l'opposition ont attribué aux forces de sécurité la responsabilité de ce nouveau décès, pour lequel le parquet a ouvert une enquête.

La manifestation a dégénéré dans le quartier de Chacao, où trois camions ont été brûlés.

Les opposants au chef de l'État ont tenté de rejoindre le siège des autorités électorales (CNE), dans le centre de Caracas, mais, comme à chacune de leurs tentatives d'entrer dans le coeur de la capitale, ils ont été repoussés par les gaz lacrymogènes des forces de l'ordre.

Les adversaires de M. Maduro le rendent responsable de l'effondrement économique du pays et l'accusent de vouloir confisquer le pouvoir, notamment avec son projet controversé de réforme de la Constitution. Ils dénoncent aussi une répression «sauvage» de la police et de l'armée lors des manifestations.

Devant un rassemblement de jeunes partisans, Nicolas Maduro a réitéré que les élections pour désigner une assemblée constituante se tiendraient le 30 juillet et «rien ne l'empêchera», a-t-il dit, menaçant de prison ceux qui troubleraient le scrutin.

«Je le jure sur mes ancêtres, je le jure sur Dieu et la patrie», a-t-il lancé.

Reconnaissant pour la première fois des abus commis par les militaires, le ministre de la Défense Vladimir Padrino Lopez a lancé mardi soir: «Je ne veux pas voir un garde national de plus en train de commettre des atrocités dans la rue».

Il réagissait ainsi à la polémique générée par la diffusion lundi de vidéos sur les réseaux sociaux montrant policiers et militaires en train d'agresser et de voler les effets personnels de plusieurs manifestants appréhendés lors des défilés.

«Celui qui ne respecte pas la ligne de l'État, l'importance suprême des droits de l'homme (...) et qui ne se comporte pas en professionnel devra en assumer les responsabilités», a affirmé M. Padrino Lopez. Le ministre avait apporté il y a quelques semaines le soutien «inconditionnel» à M. Maduro de l'armée, acteur incontournable dans le pays.

«Nous appelons M. Padrino Lopez à respecter sa parole et qu'il laisse la manifestation se dérouler en paix», a rétorqué mercredi Julio Borges, président du Parlement, unique institution contrôlée par l'opposition.

«Les paroles ne suffisent pas, M. Padrino Lopez», a renchéri la députée Delsa Solorzano, exhortant le ministre à «mettre en prison les gardes nationaux commettant des abus».

Le ministre de l'Intérieur, le général Nestor Reverol -- accusé de narcotrafic par les États-Unis --, a annoncé de son côté que les policiers impliqués dans les vols et abus avaient été identifiés et qu'ils seraient mis à la disposition de la justice.

Outre les 66 morts, les manifestations pour exiger des élections anticipées ont fait depuis le 1er avril un millier de blessés et des centaines de personnes ont été arrêtées, selon le parquet.

La procureure générale Luisa Ortega a elle aussi dénoncé des abus de l'armée, ce qui lui a valu d'être qualifiée de «traître» par le gouvernement.