Massacre en règle, détenus décapités et bilan extrêmement lourd : une mutinerie a fait 60 morts dans une prison de Manaus, dans le nord du Brésil, dans la nuit de dimanche à lundi, un bain de sang provoqué par la guerre entre factions criminelles.

« Pour le moment, nous avons décompté 60 morts », a déclaré le secrétaire à l'Administration pénitentiaire de l'État d'Amazonie Pedro Florencio, lors d'une conférence de presse.

La mutinerie, pendant laquelle 12 surveillants ont été pris en otage, a duré 17 heures entre dimanche après-midi et lundi matin dans le complexe pénitentiaire Anisio Jobim (Compaj), située en périphérie de Manaus.

« Il s'agit du plus grand massacre commis dans une prison en Amazonie », a souligné le secrétaire de l'État d'Amazonie à la Sécurité publique Sergio Fontes lors de cette conférence de presse, précisant qu'« un grand nombre de détenus ont été décapités ».

En octobre, une autre mutinerie avait déjà fait 33 morts dans deux prisons de la région amazonienne, dans les États de Rondonia, frontalier avec la Bolivie, et de Roraima, limitrophe avec le Venezuela.

À Manaus, les règlements de compte entre narcotrafiquants incarcérés ont pris une ampleur sans précédent depuis le massacre de Carandiru, qui a fait 111 morts en 1992, à Sao Paulo.

« Nous sommes parvenus à mettre fin à la mutinerie et à préserver la vie des otages », a expliqué M. Florencio.

Selon le site d'information brésilien G1, citant l'Organisation des Avocats du Brésil (OAB), plus de 130 détenus se sont enfuis de la prison.

« Nous n'avons toujours pas le nombre de fugitifs parce que les opérations dans la prison sont toujours en cours », a décrit M. Fontes. Il a indiqué que 16 tunnels, par lesquels des prisonniers se sont échappés, avaient été découverts.

Cité par G1, le président de la commission des droits de l'homme de l'OAB en Amazonie, Epitacio Almeida, les mutins ont libéré les derniers otages et rendu les armes à 08H40 locales (12h40 GMT). Une cellule a été incendiée, mais les autorités n'ont pas déploré d'autres dégâts matériels majeurs.

« Guerre entre factions »

« Nous vivons une guerre silencieuse du trafic de drogue et l'État se doit d'intervenir. Les factions se battent entre elles pour gagner plus d'argent, c'est une lutte de territoire », a alerté M. Fontes.

Les mutineries sont fréquentes dans les prisons surpeuplées du Brésil, qui sont contrôlées en interne par ces factions criminelles.

« Cette guerre entre factions a lieu dans tout le pays, dans toutes les unités pénitentiaires », a confirmé M. Florencio, qui a évoqué une « vengeance » du groupe local FDN (Familia do Norte) contre le PCC (Premier commando de la capitale), fondé à Sao Paulo.

Le secrétaire à la Sécurité publique a expliqué que cette mutinerie n'avait « pas été planifiée à l'avance », mais a estimé que la faction avait « envoyé un message à ses rivaux ».

Avec 622 000 détenus recensés par le ministère de la Justice fin 2014, le Brésil compte la quatrième population carcérale au monde, derrière les États Unis, la Chine et la Russie.

Pour faire face à la pression carcérale, le pays devrait augmenter de 50 % la capacité de ses prisons, selon un rapport du ministère.

Au niveau national, le taux d'occupation est de 167 %, soit 1,67 détenu par place disponible, un chiffre qui s'élève à 2,59 en Amazonie, qui comptait 8868 détenus en 2014.