Le gouvernement socialiste du Venezuela et l'opposition de centre droit ont accepté lundi, à l'appel du Vatican, de commencer à dialoguer pour tenter de surmonter la grave crise politique frappant ce pays, en plein naufrage économique.

« Aujourd'hui, le dialogue national a débuté au cours d'une rencontre entre représentants du gouvernement et de l'opposition, avec l'objectif d'établir les conditions pour organiser une réunion plénière sur l'île Margarita [dans le nord du Venezuela, NDLR] le 30 octobre », soit dimanche prochain, a annoncé l'émissaire du pape, l'Argentin Emil Paul Tscherrig, pendant une conférence de presse.

Peu avant, le Vatican avait déclaré que le pape François venait de recevoir le président Nicolas Maduro, une audience qui n'avait pas été annoncée.

« Il l'a invité à entrer avec courage dans la voie d'un dialogue sincère et constructif » avec l'opposition qui demande son départ, afin d'« alléger les souffrances de la population, en particulier des pauvres » et de maintenir « la cohésion sociale », selon un communiqué du Saint-Siège.

L'annonce surprise du dialogue entre gouvernement et opposition survient à un moment d'extrême tension, quelques jours après l'annonce par le Conseil national électoral (CNE) de la suspension sine die du processus en vue d'un référendum révocatoire.

Ce dernier, que l'opposition cherche à organiser depuis de longs mois, devait entrer dans sa dernière ligne droite cette semaine avec une nouvelle collecte de signatures.

Furieux, le camp des opposants à M. Maduro avait dénoncé après l'annonce du CNE un « coup d'État » et une « dictature » : la coalition de la Table pour l'unité démocratique [MUD, centre droit], qui réunira le Parlement - où elle est majoritaire - mardi, avait d'ailleurs brandi la menace de déclencher « un procès et une procédure devant le Parlement » contre le président accusé d'avoir orchestré via le CNE un « coup d'État ».

À un moment où le référendum est dans l'impasse, l'opposition étudie tous les moyens d'obtenir le départ anticipé de Nicolas Maduro, élu en 2013 et dont le mandat s'achève en 2019.

Elle reproche au chef de l'État, héritier politique du défunt Hugo Chavez (1999-2013), d'avoir fait sombrer ce pays producteur de pétrole en plein naufrage économique, en n'ayant pas su prévoir la chute des cours du brut ni y réagir à temps.

Au quotidien, cette crise a des conséquences désastreuses pour les Vénézuéliens, obligés de patienter des heures face à des supermarchés et pharmacies aux rayons presque vides ou aux produits que leurs prix rendent inabordables.

Les pénuries concernent 80 % des aliments et des médicaments et l'inflation, totalement incontrôlable, est évaluée par le FMI à 475 % cette année et devrait s'élever à 1,660 % en 2017.

Pression internationale

Excédés, plus de six Vénézuéliens sur dix se disent prêts à voter pour la révocation du président Maduro et, pour surfer sur ce mécontentement populaire, l'opposition appelait à de grandes manifestations mercredi dans tout le pays.

L'annonce du dialogue avec l'exécutif pourrait toutefois aboutir à l'annulation de cet appel à manifester qui s'inscrit dans une stratégie consistant à utiliser la rue en tant que moyen de pression, avec plus ou moins de succès ces derniers mois, la population se décourageant et craignant des débordements violents.

La peur de la répression est également dans tous les esprits, après les manifestations de 2014 qui s'étaient soldées par un bilan officiel de 43 morts.

« La bataille institutionnelle est perdue, donc l'Assemblée nationale a défini les grandes lignes de ce que sera sa bataille politique : les actions de protestation populaire, la démonstration de force de la majorité [au Parlement] et l'appel à la pression internationale », explique à l'AFP l'analyste Luis Vicente Leon.

Des responsables de la MUD devaient d'ailleurs se rendre à Washington pour demander que l'Organisation des États américains (OEA) applique au Venezuela les dispositions de la Charte démocratique interaméricaine, qui prévoit des sanctions en cas de rupture des règles démocratiques.

Le secrétaire général de l'OEA, Luis Almagro, a estimé que ce pays était en proie à une telle « rupture » et douze de ses pays-membres dont l'Argentine, le Brésil, l'Uruguay, la Colombie, le Mexique, le Chili et le Costa Rica, ont exprimé leur « préoccupation ».

Lundi, le président argentin Mauricio Macri, l'un des critiques les plus féroces du gouvernement de M. Maduro, a prévenu que « dans ces conditions, le Venezuela ne peut faire partie du Mercosur [le marché commun sud-américain, NDLR] car on n'y respecte pas les droits de l'homme ».

Bataille politique

Excédés, plus de six Vénézuéliens sur dix se disent prêts à voter pour la révocation du président Maduro, actuellement en tournée au Moyen-Orient où il tente d'obtenir des accords pour une hausse des prix du pétrole.

L'opposition cherchera à surfer sur ce mécontentement populaire mercredi : elle appelle à de grandes manifestations dans tout le pays.

Dimanche, lors d'une séance houleuse marquée par l'irruption dans l'hémicycle de partisans du président, l'Assemblée a invité « le peuple du Venezuela à la défense active (de la Constitution) jusqu'au rétablissement de l'ordre constitutionnel ».

La capacité du camp anti-Maduro à faire descendre les Vénézuéliens dans les rues a connu plus ou moins de succès ces derniers mois, alors que la population se décourage et craint des débordements violents dans ce pays où la criminalité est parmi les plus élevées au monde.

La peur de la répression est également dans tous les esprits, après les manifestations violentes de 2014 qui s'étaient soldées par un bilan officiel de 43 morts.

« La bataille institutionnelle est perdue, donc l'Assemblée nationale a défini les grandes lignes de ce que sera sa bataille politique : les protestations populaires, la démonstration de sa majorité (au Parlement) et l'appel à la pression internationale », explique à l'AFP l'analyste Luis Vicente Leon.

Des responsables de la MUD vont d'ailleurs se rendre à Washington pour demander que l'Organisation des États américains (OEA) applique au Venezuela les dispositions de la Charte démocratique interaméricaine, qui prévoit des sanctions en cas de rupture démocratique.

Le secrétaire général de l'OEA, Luis Almagro, avait déjà estimé vendredi que le Venezuela était en pleine « rupture démocratique » après la suspension du processus de référendum.

Douze pays de l'OEA, dont l'Argentine, le Brésil, l'Uruguay, la Colombie, le Mexique, le Chili et le Costa Rica, ont exprimé leur « préoccupation » devant la crise vénézuélienne et ont appelé le gouvernement au dialogue.

photo Ariana Cubillos, archives AP

Une femme porte des lunettes à l'effigie du drapeau national alors qu'elle participe à une manifestation pour réclamer la destitution du président Maduro, à Caracas, le 22 octobre.