Les autorités électorales du Venezuela ont commencé mercredi à vérifier la validité des deux millions de signatures présentées par l'opposition en faveur d'un référendum pour révoquer le président Nicolas Maduro, qui a promis de respecter la volonté populaire.

«Ce que dira le CNE (Conseil national électoral, ndlr) sera parole sacrée» et si les signatures sont validées, «nous irons vers un référendum, point», a assuré le dirigeant socialiste à la télévision.

Le CNE, réputé proche du gouvernement, dispose de cinq jours pour vérifier les listes puis appellera les signataires à confirmer en personne leur choix sur une autre période de cinq jours.

«Nous sommes dans le processus de comptabilisation des signatures, avec sécurité, célérité et transparence (...) peut-être jusqu'à lundi ou mardi», a expliqué la présidente du CNE, Tibisay Lucena, lors d'une conférence de presse.

La consultation, organisée la semaine dernière, avait mobilisé les Vénézuéliens, excédés par une crise qui les prive d'électricité plusieurs heures par jour, a entraîné la fermeture des services publics cinq jours par semaine et vide les rayons des supermarchés.

Euphorique, l'opposition, réunie dans une vaste coalition, la Table pour l'unité démocratique (MUD), a remis lundi 1,85 million de signatures anti-Maduro, presque dix fois le minimum requis (195 721, 1% de l'électorat).

«La participation massive du peuple et le lancement du référendum rendent fou» le gouvernement, s'est réjoui l'un des chefs de l'opposition, Henrique Capriles, candidat malheureux à l'élection présidentielle de 2013.

Embûches 

Surmontant ses divisions, l'opposition se sent désormais en position de force, dominant le Parlement et visant un objectif commun: faire partir au plus vite Nicolas Maduro, au pouvoir jusqu'en 2019.

Mais les embûches restent nombreuses sur son chemin.

Le président a ainsi nommé une commission chargée de surveiller le processus.

«Nous allons avoir accès à toutes les listes» de signatures, a-t-il déclaré, avant de mettre en garde : «signature falsifiée, recours assuré».

Une vingtaine de «témoins» surveillera, pas à pas, chacune des étapes, a prévenu Jorge Rodriguez, coordinateur de cette commission, et «dans quelques jours on va savoir qu'ils ont gonflé d'un million le nombre de signatures qu'ils disent avoir remis».

Si cette première étape est validée, le CNE demandera à l'opposition de réunir en trois jours quatre millions de signatures (20% de l'électorat), deuxième marche à franchir pour qu'enfin, l'organisme donne le feu vert à un référendum, devant être organisé dans les trois mois suivants.

Le référendum révocatoire n'a été utilisé qu'une seule fois dans l'histoire du pays, contre l'ex-président Hugo Chavez (1999-2013) en 2004: il s'était soldé par un échec.

Cette fois, il pourrait bénéficier de la grogne sociale croissante, dans un pays à l'économie sinistrée par la chute des cours du pétrole, sa principale richesse, et confrontée à une grave pénurie d'électricité.

Selon un récent sondage de Venebarometro, 68% des habitants souhaitent le départ immédiat du président Maduro.

Le peuple dans la rue? 

Pour l'écarter du pouvoir, il faudra dépasser son score obtenu en 2013 - 7,5 millions de votes -, mais la question du calendrier est cruciale : si le référendum survient avant le 10 janvier 2017 et le «oui» l'emporte, le Venezuela irait vers de nouvelles élections.

Mais à partir du 10 janvier, tout référendum couronné de succès ne mènerait qu'à une chose: le remplacement de M. Maduro par son vice-président Aristobulo Isturiz, du même parti.

Pour le spécialiste du droit constitutionnel Hermann Escarra, conseiller du gouvernement, les éventuels recours devraient repousser la consultation «au second semestre de l'an prochain».

«Si le CNE ne respecte pas les délais, il aura le peuple dans la rue», a averti Henrique Capriles, alors que le pays avait été secoué de violentes manifestations en 2014, qui avaient fait officiellement 43 morts.

Nicolas Maduro, qui garde un pouvoir important, contrôlant le gouvernement et la plupart des institutions, a lui affirmé d'un ton serein qu'il était «prêt pour tout ce qui peut arriver».

Mais il a ajouté immédiatement : «je ne suis ni voyant, ni sorcier, mais mon Dieu, je vois déjà le désastre qui va sortir de cette tentative de la droite vénézuélienne pour organiser ce référendum».