Gustavo Gallon, l'expert indépendant des Nations unies sur la situation des droits de l'homme en Haïti, a déploré l'absence d'avancée du respect des droits fondamentaux dans le pays, lors d'une conférence de presse mardi à Port-au-Prince.

«Les violations des droits se répètent tous les jours», a regretté Gustavo Gallon, affirmant que «ces problèmes auraient dû être résolus depuis longtemps».

Les conditions de vie inhumaines dans les prisons d'Haïti sont l'une des premières préoccupations du juriste colombien.

«J'ai visité la prison qui offre les meilleures conditions», a expliqué Gustavo Gallon après avoir inspecté jeudi dernier le centre pénitentiaire de Croix des Bouquets, établissement de haute sécurité inauguré fin 2012. «Certes il y a des lits en béton, qu'on ne trouve pas ailleurs, mais, sur ces lits prévus pour huit personnes, douze personnes s'entassent», a-t-il témoigné.

Avec un taux d'occupation des prisons dépassant les 450%, selon le dernier rapport de l'International Center for Prison Studies, la surpopulation carcérale en Haïti est l'une des plus élevées au monde et l'extrême lenteur de la justice en est la première cause.

À l'échelle nationale, 72% des personnes actuellement incarcérées sont toujours en attente de jugement, mais la détention préventive prolongée, dénoncée depuis des décennies par toutes les organisations de défense des droits humains, reste la norme.

«J'ai rencontré un prisonnier qui était en détention provisoire depuis décembre 2012, soit plus de trois ans. Il est accusé d'avoir acheté une arme qui aurait été volée. S'il était jugé et déclaré coupable, ce crime est passable d'une peine d'un an et demi. Il n'a jamais été entendu par un juge», a rapporté Gustavo Gallon.

Au cours de sa visite de quelques jours en Haïti, l'expert indépendant s'est également rendu sur un des points de frontière avec la République dominicaine pour s'enquérir des conditions de vie des personnes expulsées du pays voisin.

Suite à un changement de la politique migratoire dominicaine en 2013, les enfants nés dans le pays de parents étrangers ont perdu leur nationalité.

Face au tollé international de cette mesure qui menaçait 250 000 personnes d'apatridie, la République dominicaine a ouvert un processus d'enregistrement des personnes concernées. Mais à sa clôture en aout 2015, ceux, nombreux, qui n'étaient pas parvenus à réunir les pièces nécessaires à la procédure, ont commencé à être expulsés vers Haïti sans avoir souvent le temps de prévenir leurs proches ou de prendre leurs effets personnels.

«Du 1er au 27 février, on a enregistré 2484 expulsions dans ces conditions, dont 294 femmes adultes et 161 mineurs», a relevé Gustavo Gallon.

Son mandat limité à Haïti, l'expert indépendant a néanmoins renouvelé auprès des autorités dominicaines son «appel, de façon respectueuse et d'un point de vue humanitaire, à protéger cette population».