Une série de morts rapides et inexpliquées de plus d'une dizaine de chiens dans un parc de la capitale mexicaine a transformé les promenades anodines des maîtres et de leurs animaux en déambulations inquiètes, sous surveillance policière.

Tous se demandent si un tueur en série de chiens ne rôde pas dans le secteur depuis dix jours.

«Alerte rouge. Empoisonnements fulgurants de chiens dans le Parc Mexico. Faites très attention aux enfants», indique un des panneaux dressés dans cet espace bucolique de plus de neuf hectares, désormais partiellement fermé, situé dans le quartier chic et à la mode de la Condesa, où de nombreux chiens se promènent quotidiennement.

«Tant que l'enquête sur l'empoisonnement de chiens (...) n'a pas abouti, il est recommandé de réduire les promenades», indique un autre panneau placé dans une allée de ce parc construit dans les années 20, à l'architecture Art déco, aujourd'hui entouré de dizaines de restaurants et de bars fréquentés par des étrangers et des personnalités mexicaines du monde artistique ou politique.

Selon un hôpital vétérinaire, 11 chiens auraient vraisemblablement été empoisonnés. Selon un groupe de défense des animaux, ce chiffre s'élèverait à 18.

Devant la mobilisation angoissée des propriétaires canins, prolongée sur les réseaux sociaux et suivie de plaintes, la justice s'est emparée du dossier et procède à des vérifications préliminaires sur cet hypothétique «tueur de chiens de la Condesa».

«Nous faisons des rondes, nous essayons d'enquêter, nous interrogeons certaines personnes que nous voyons», indique un policier mobilisé.

La justice a ordonné des examens toxicologiques sur les cadavres des chiens empoisonnés et des employés de la ville nettoient les allées à l'aide de jets à haute pression.

Les vétérinaires qui ont tenté de soigner les chiens décédés pensent qu'ils ont ingurgité «une substance appelée fluorure de zinc» explique Berenice Nimodio, de l'Hôpital Animalia, qui a soigné plusieurs d'entre eux.

Tous les chiens présentaient les mêmes symptômes : 20 minutes après leur promenade dans le parc, ou dans les rues avoisinantes, ils ont été pris de vomissements, puis de convulsions avant de subir un arrêt cardiaque, selon la vétérinaire.

«Il y a des gens malades qui font ce genre de choses (laisser de la nourriture empoisonnée dans le parc), mais il y a aussi des propriétaires qui ne ramassent pas les excréments de leurs animaux et s'attirent ainsi les foudres (des autres promeneurs)», souligne Guillermo Islas, un artisan qui vend depuis 30 ans ses produits dans le parc.

«Chaque vie mérite le respect»

Dans un pays où la guerre causée par le trafic de drogue a causé la mort de 80 000 personnes, où plus de 90 % des crimes restent impunis, les mesures prises par les autorités pour retrouver ce «tueur de chiens» n'ont pas manqué de déclencher un débat sur les réseaux sociaux sur l'importance à accorder au sujet.

«Chaque vie mérite le respect», déclare Vicente Solano, un employé d'un groupe immobilier, tandis qu'il déambule «inquiet et attentif» aux mouvements de son Golden Retriever.

«Tous les crimes doivent faire l'objet d'une enquête, ceux des chiens comme ceux des hommes. Ce sont des vies qu'il faut respecter», ajoute-t-il.

Mercredi, les propriétaires de chiens ont témoigné devant les autorités. Parmi eux, Caroline Owen, une Britannique, dont la chienne Daisy est décédée vendredi.

Le cadavre de son animal ainsi qu'un autre ont été congelés avant d'être analysés par l'Université autonome de Mexico (UNAM).

Elle pense que derrière ces crimes ne se cache pas une personne, mais plutôt un groupe de gens.

Elle reconnaît qu'il sera difficile d'interpeller le ou les tueurs de chiens dans un pays où les carences en matière de justice sont immenses.

Caroline avertit toutefois que les propriétaires de chiens empoisonnés ne s'arrêteront pas jusqu'à obtenir justice.

«Nous n'allons pas arrêter. Ces petits chiens étaient pour nous comme nos enfants», dit-elle.

Devant le peu de perspective d'obtenir des réponses de la part des autorités, elle demande : «Est-ce qu'il faudra la mort d'un enfant pour qu'ils fassent quelque chose?».