Signataire des accords de paix à la fin de la guerre civile au Guatemala, le général en retraite Otto Pérez, président depuis 2012, suscite un mécontentement populaire sans précédent, risquant de perdre son immunité après des accusations de corruption.

À son arrivée au pouvoir, cet homme à la soixantaine sportive et aux cheveux poivre et sel avait promis de lutter avec une «main de fer» contre la criminalité, dans ce pays d'Amérique centrale qui est l'un des plus violents au monde, miné par le crime organisé.

D'un verbe sobre mais tranchant trahissant son passé militaire, il comptait mettre à profit son expérience de 34 ans au sein de l'armée, opposée à une guérilla pendant un conflit civil qui a ravagé le pays et fait quelque 200 000 morts et disparus entre 1960 et 1996.

Quatre ans plus tard, même si la situation sur le front de la sécurité ne s'est pas améliorée, ce n'est pas cela que lui reprochent des milliers de Guatémaltèques.

S'ils manifestent depuis des mois, c'est pour dénoncer son implication dans un vaste réseau de corruption, dont il est le «numéro un» selon le parquet et la commission de l'ONU contre l'impunité (Cicig).

«C'est le prototype de l'homme politique guatémaltèque, très apprécié des élites qui ne veulent pas que les choses changent», soupire Manfredo Marroquin, directeur de l'ONG Accion Ciudadana, branche locale de l'organisation anti-corruption Transparency International.

«Sa plus grande erreur a été de croire dans le régime d'impunité» qui prévalait avant, mis à mal par la Cicig, ajoute-t-il.

Fin tacticien, l'ex-général de 64 ans se retranche dans le palais présidentiel depuis ces accusations, formulées officiellement le 21 août, et évite toute activité publique, hormis une conférence de presse ce lundi.

«Je ne vais pas fuir»

Fermement, il assure qu'il ne partira pas avant la fin de son mandat, programmée le 14 janvier prochain.

«Je vais faire face. Je resterai à la tête du pays, je ne vais pas fuir», a-t-il affirmé alors même que son ancienne vice-présidente, Roxana Baldetti, est déjà en détention provisoire dans cette affaire.

C'est avec elle qu'il avait créé en 2001 le parti Patriote (PP, droite).

Ses soutiens assurent que le dirigeant a une grande capacité d'écoute.

Mais s'il s'est montré fin stratège durant son mandat, selon l'accusation, c'est surtout dans l'art de placer des proches à des postes-clés, afin de contrôler l'organisme de collecte des impôts qu'il s'est illustré.

Né à Guatemala le 1er décembre 1950, le «Général de la Paix», surnom qu'il aime à entretenir depuis qu'il a signé au nom de l'armée les accords ayant mis fin à la guerre en 1996, a raccroché l'uniforme il y a 15 ans pour faire son entrée en politique.

Une reconversion qui a failli tourner court: le 21 février 2001, trois jours seulement après avoir créé son parti, il sort indemne avec sa femme et sa fille d'une tentative d'assassinat d'hommes armés qui tirent sur le véhicule dans lequel ils se trouvent.

Battu au deuxième tour de la présidentielle de 2007 par Alvaro Colom, Otto Pérez avait ensuite lâché le costume pour faire campagne en 2011 en jean et bras de chemise orange, la couleur de sa formation, un nouveau style qui lui a valu le surnom de «Général en jean».

Marié et père de deux enfants, il a été le premier militaire à parvenir au sommet de l'État guatémaltèque, depuis le retour à la démocratie en 1985, une ascension alors perçue comme un antidote à la corruption endémique au sein des administrations.

Déjà inculpé à plusieurs reprises pour des cas de violation des droits de l'homme pendant la guerre civile, il a toujours nié ces accusations.