Le gouvernement colombien et la guérilla des FARC ont publié mercredi l'intégralité des accords partiels déjà conclus dans le cadre des discussions de paix, renonçant à leur décision initiale de garder secret le détail des avancées des pourparlers entamés fin 2012 à Cuba.

Pour justifier ce revirement, les délégations ont invoqué leur souci de «transparence» et leur désir de couper court aux «spéculations» autour de ce projet d'accord de paix, dans un communiqué commun transmis à l'AFP.

Selon les parties, les spéculations «sont le produit, soit d'un manque d'informations sur les communiqués et rapports, soit d'une intention claire de désinformer l'opinion publique».

De son côté, le président Juan Manuel Santos a estimé à New York que l'état d'avancée des discussions permettait désormais leur divulgation.

«Au début des discussions nous avions décidé de ne pas publier les accords, de ne pas les rendre publics pour protéger le processus mais nous avons considéré que le processus avait suffisamment avancé et qu'il est assez consolidé pour rendre public ce sur quoi nous sommes tombés d'accord», a déclaré M. Santos à la presse en marge de l'Assemblée générale de l'ONU.

L'initiative a également pour but de faire taire «les gens qui ne sont pas amis du processus de paix», a-t-il ajouté.

«Chaque Colombien pourra désormais constater ce que nous avons conclu», a déclaré dans la soirée le chef de la délégation du gouvernement colombien, l'ex-vice-président Humberto De la Calle.

Deux ans d'intenses discussions 

«C'est une annonce très importante. On avait dit que rien ne serait signé tant que l'ensemble de l'accord ne serait pas signé, mais cela ne pourra plus être contesté parce qu'on sait désormais ce qui a été accordé», a salué Victor G. Ricardo, qui a participé à de précédentes négociations de paix avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC).

«Dans ces processus, la spéculation sur ce qui a été conclu fait plus de mal que la réalité», a abondé le secrétaire général de l'Unasur Ernesto Samper, interrogé par la radio colombienne RCN.

Ces projets d'accords «représentent le résultat de près de deux ans d'intenses discussions souvent difficiles» sur les trois premiers des six volets prévus des discussions, ont encore précisé les deux délégations.

Une source proche des pourparlers a confirmé à l'AFP que ces trois textes de 65 pages ne recèlent pas de véritable nouveauté, les principales avancées ayant déjà été annoncées en marge des pourparlers de la Havane.

Sur le développement rural, les parties se sont accordées sur les modalités de l'accès aux terres et leur utilisation, un programme de développement rural, la réduction de la pauvreté et la sécurité alimentaire.

Au sujet du retour de la guérilla dans le concert politique après la conclusion d'un accord général, les délégations se sont engagées sur une nouvelle ouverture politique, l'accompagnement citoyen de la paix et la fin de la relation entre la politique et les armes.

Sur le volet de la lutte contre le trafic de drogue, ont été définis les conditions de l'éradication des cultures illicites, la prévention et le traitement de la consommation et la lutte contre les trafiquants, avec un engagement formel des parties à y participer activement.

Les délégations ont reconnu que des différends demeuraient sur certains détails, signalés dans les documents publiés.

«Rien de définitif»

Les questions restant à discuter sont les réparations aux victimes, actuellement en négociation, la fin effective du conflit - avec la question cruciale du désarmement de la guérilla - et les modalités de ratification d'un éventuel accord de paix global.

Monseigneur Luis Augusto Castro, président de la conférence épiscopale de Colombie, a salué sur l'antenne de RCN ce pas «très positif», mais il s'est fait l'avocat de la publication des textes «dans un langage très simple» pour qu'ils puissent être lus et compris par tous les Colombiens.

Pour Carlos Medina, du Centre de réflexion et de suivi du processus de paix, la publication des accords partiels démontre à la fois la solidité et l'avancée des pourparlers.

«Cette publication garantit une plus grande solidarité et l'accompagnement du processus par la société civile, et démontre que rien n'est négocié en sous-main», explique l'universitaire à l'AFP.

A La Havane, les délégués ont toutefois tenu à bien préciser que ces accords ne seront définitifs qu'une fois signés et que les parties peuvent revenir à tout moment sur ce qui a été arrêté.

«Rien n'est définitif jusqu'à ce que tout soit signé», ont-ils insisté.