Une femme se présentant comme le témoin de la mort de 22 criminels présumés abattus par l'armée mexicaine en juin dernier a assuré à la revue Esquire que 21 d'entre eux avaient été exécutés après s'être rendus, et non au cours d'un affrontement, contrairement à la version des autorités.

«Il les ont fait mettre en file et les ont tués», selon Julia, nom fictif donné au témoin par la revue Esquire qui publie jeudi sur son site internet des extraits d'une enquête à paraître en octobre.

Interrogé par l'AFP, un responsable du ministère mexicain de la Justice a souligné que l'enquête judiciaire sur cette affaire était «ouverte, pas encore conclue» et qu'il ne pouvait pas donner de détails pour l'instant.

Cependant, il affirme que, «jusqu'à présent, il n'y a pas d'éléments permettant de penser qu'il se serait agi d'un règlement de comptes ou d'exécutions» de la part de militaires.

Le 30 juin, le ministère de la Défense avait publié un communiqué dans lequel il était écrit que «22 agresseurs présumés», 21 hommes et une femme mineure, avait été tués au cours d'une patrouille nocturne de soldats à Tlatlaya à 240 km au sud-est de Mexico.

Selon ce communiqué, l'affrontement avait eu lieu à l'aube après que des militaires eurent localisé un entrepôt «gardé par des hommes armés qui ont ouvert le feu en se rendant compte de la présence de troupes, ce qui a amené le personnel militaire à répliquer à cette agression».

Le ministère avait précisé que 25 armes lourdes avaient été saisies et que trois femmes «qui ont expliquées avoir été enlevées» par le commando avaient été trouvées sur place.

La revue Esquire assure que le témoin Julia, qui cache son vrai nom de crainte de représailles, est l'une des ces trois femmes. Elle nie avoir été enlevée par ce groupe, sans expliquer la raison de sa présence sur les lieux.

Julia soutient que ce sont les militaires qui ont tiré les premiers et que, dans la fusillade, il n'y a eu qu'un mort. Les 21 autres personnes, dont une adolescente de 15 ans blessée à la jambe dans les échanges de coups de feu, auraient été tuées part les militaires après s'être rendues en demandant qu'on leur laisse la vie sauve.

Selon José Miguel Vivanco, directeur de l'ONG Human Rights Watch, le témoignage publié par Esquire «indiquerait que nous sommes devant le pire massacre de civils de la part de militaires» depuis l'arrivée du président mexicain Enrique Peña Nieto au pouvoir en décembre 2012.

«Le gouvernement de Peña Nieto ne peut garder le silence», a-t-il déclaré à l'AFP.

Le gouvernement de M. Nieto a maintenu le vaste déploiement militaire contre les trafiquants de drogue décidé en 2006 par son prédécesseur Felipe Calderon et qui avait fait plus de 70 000 morts. Il s'était accompagné de nombreuses dénonciations d'exactions de militaires contre les civils.