Le premier ministre haïtien Laurent Lamothe a appelé jeudi la communauté internationale à continuer à financer la reconstruction du pays frappé par un violent séisme en 2010 et assuré que les législatives auraient bien lieu cet automne, dans un entretien exclusif à l'AFP.

Le premier ministre, désigné en 2012 par le président Michel Martelly, a pressé la communauté internationale de «continuer à respecter ses engagements».

«Sur les 9 milliards de dollars promis à Haïti après le séisme, seuls 48% ont été livrés principalement dans l'humanitaire et l'urgence», a-t-il détaillé.

Le chef du gouvernement haïtien se félicite toutefois que des pays aient financé des projets de reconstructions de quartiers entièrement rasés par le violent tremblement de terre qui avait fait entre 200 000 et 250 000 morts et plus de 1,5 million de déplacés.

Après le séisme, «40% de la population de la capitale, soit 1,5 million de personnes vivaient sous des tentes. Aujourd'hui, il ne reste plus que 125 000 personnes dans les camps. D'ici à 2015, nous allons construire 10 000 logements sociaux avec l'aide de plusieurs bailleurs de fonds. Nous avons déjà construit plus de 3000 maisons et rénové environ 4.000 autres avec nos maigres moyens», a-t-il relevé.

Jeudi, il a lancé le plan de rénovation de deux quartiers défavorisés de la capitale avec une assistance de 30 millions d'euros fournis par la France et l'Union européenne.

Concernant la reconstruction du centre de Port-au-Prince quasiment détruit par le séisme, le premier ministre haïtien a annoncé un projet de 400 millions de dollars pour ériger une «cité administrative moderne, selon les réalités financières d'Haïti alors qu'un plan proposé par le Prince Charles s'élevait à plus de 3 milliards de dollars».

Le financement sera assuré en partie par des bailleurs et grâce à l'annulation par le FMI de la dette du pays. À la suite du séisme, le Fonds monétaire international avait accordé une remise de dette de 268 millions de dollars.

Dans le cadre de ces grands travaux, la démolition sur ordre du gouvernement de maisons à Port-au-Prince a entraîné la colère de certains habitants contraints de se déplacer.

«Nous nous sommes engagés à reloger les personnes forcées d'abandonner leurs maisons pour nous permettre de construire une ville qui rendra la fierté aux Haïtiens», a soutenu le premier ministre.

Législatives prévues à l'automne

M. Lamothe s'est également engagé à la tenue d'élections législatives, comme l'avait annoncé son gouvernement début juin. Le retard de ces élections, qui auraient dû être organisées il y a trois ans, provoque une crise politique dans le pays secoué par des manifestations antigouvernementales.

«Haïti jouit aujourd'hui d'une certaine stabilité que le pays n'avait pas connue avant», a néanmoins assuré le premier ministre. «Il faut la préserver. Donc, nous allons vers les élections, car toutes les mesures sont prises pour réaliser ce scrutin le 26 octobre prochain», a-t-il assuré.

L'opposition exige notamment la mise en place d'un conseil électoral moins inféodé à l'administration de Michel Martelly.

Plus de 114 partis politiques se sont inscrits pour ces élections législatives (112 députés et 20 sénateurs) et municipales. Toutefois, d'importants partis politiques de l'opposition menacent de ne pas prendre part aux joutes si des changements ne sont pas apportés dans la composition de l'organisme électoral.

«Nous allons continuer à parler à tous les secteurs concernés. Mais la tenue des élections à la date fixée est essentielle et incontournable pour maintenir la stabilité dans le pays», a répété Laurent Lamothe, vu comme le dauphin de Michel Martelly, dont le mandat prendra fin en 2016.

Toutefois, le premier ministre refuse de se projeter dans l'avenir.

«Je suis premier ministre, je me concentre avec mon équipe sur le quotidien du pays. Je vois mon travail un jour à la fois. Je ne vois pas mon avenir personnel», a-t-il conclu.