Des barricades éparses bloquaient toujours certaines rues de Caracas, vendredi, même si la vie suivait son cours dans d'autres quartiers, alors que l'affrontement politique se poursuivait de plus belle durant la deuxième journée d'un long congé national.

Malgré la longue fin de semaine précédant les trois jours du Carnaval, des manifestations menées par des étudiants sont toujours visibles dans les rues, non seulement dans la capitale du Venezuela, mais également dans d'autres villes, comme Valence, Merida, ou encore San Cristobal.

C'est dans ce contexte que le président Nicolas Maduro est allé de l'avant avec une nouvelle ronde de rencontres télévisées, vendredi, visant à rétablir une ambiance sereine au pays. Il a annoncé son intention de tenir de telles conférences dans tous les États. Les membres de l'opposition ne participaient cependant pas à l'exercice, ceux-ci refusant d'entamer le dialogue avant que M. Maduro ne libère les protestataires arrêtés, et cesse d'envoyer les forces de sécurité tenter de mater les manifestants.

«Je crois que le pays pourrait gagner si nous nous asseyions face à face pour discuter», a dit le président.

Cette perspective semble cependant peu probable, alors que l'un des leaders de l'opposition est en prison, et qu'un autre est visé par un mandat d'arrêt.

Près de deux semaines de manifestations sous contrôle étudiant dans des quartiers appartenant majoritairement à la classe moyenne ont fait 17 morts. Les Vénézuéliens sont sous le coup d'une inflation ayant atteint 56% l'an dernier, en plus de subir des pénuries de produits de base et d'être aux prises avec une importante vague de criminalité.

Lors d'une manifestation en faveur des droits de l'homme tenue dans un quartier chic de l'est de Caracas, plusieurs centaines de manifestants ont brandi des drapeaux nationaux et tenus des pancartes arborant les photos des personnes tuées lors des manifestations.

«Il n'y aura pas de paix avant que justice ne soit rendue», a déclaré Amanda Valero, une coiffeuse de 32 ans.

Plus tard vendredi soir, des actes de violence ont éclaté et des dizaines de manifestants ont lancé des pierres et des cocktails Molotov en direction de membres de la Garde nationale, qui ont riposté avec des balles en caoutchouc et des canons à eau. La télévision d'État a rapporté que 41 personnes ont été détenues.

Mais dans le gigantesque bidonville de Petare, la vie suivait son rythme habituel, avec des centaines de vendeurs ambulants vantant leur marchandise dans la place centrale.

«Les gens de Petare sont des guerriers, les gens de Petare ne s'arrêtent pour aucune raison, a lancé Yuly Chacon, un professeur de 27 ans. Ces manifestations sont le fait des zones riches.»

La procureure générale du pays, Luisa Ortega Diaz, a annoncé vendredi la mort par balle d'un adolescent qui nettoyait, la veille, une rue dans l'État de Carabobo.

Le responsable onusien des droits de l'homme a réclamé vendredi que le gouvernement du Venezuela respecte le droit d'assemblée pacifique et a fait part de ses inquiétudes quant à l'utilisation de force excessive contre les manifestants.

De son côté, le secrétaire d'État américain John Kerry a indiqué que Washington pourrait évaluer ses options à la lumière d'une proposition du Sénat visant à refuser et à révoquer des visas, ainsi qu'à geler les biens de Vénézuéliens liés à la répression gouvernementale.

Les autorités vénézuéliennes ont annoncé l'arrestation de huit membres des services nationaux de renseignement en lien avec des accusations de meurtre, ainsi que de trois soldats de la garde nationale et de trois policiers.

«L'État vénézuélien a agi pour punir, pour sanctionner ces personnes qui semblent responsables de violations des droits de l'homme», a déclaré la procureure Ortega Diaz.