La police haïtienne a dispersé lundi avec du gaz lacrymogène une manifestation à Port-au-Prince en soutien à l'ex-président Jean-Bertrand Aristide, où des slogans hostiles à l'actuel chef de l'Etat Michel Martelly ont également été lancés, a constaté un journaliste de l'AFP.

Plusieurs milliers de personnes s'étaient rassemblées dans la matinée au Champ-de-Mars, à proximité de la présidence haïtienne, pour exprimer leur soutien à M. Aristide, rentré d'exil en mars 2011, à l'occasion des 22 ans du coup d'État qui l'avait renversé.

Des milliers de personnes ont également manifesté dans la deuxième ville du pays Cap-Haïtien, ont annoncé des radios de la capitale.

À Port-au-Prince, les manifestants, parmi eux des dignitaires du parti Lavalas de M. Aristide, ont notamment réclamé à  l'actuel chef de l'État Michel Martelly de «ne pas persécuter» son prédécesseur. «Toute persécution contre Aristide est une persécution contre le peuple», pouvait-on lire sur une pancarte.

Certains ont également lancé des slogans hostiles à M. Martelly.

«Martelly, vous êtes un bon musicien, un comédien très aimé, vous devez retourner à la musique et laisser la direction du pays à ceux qui le peuvent», a déclaré Printemps Bélizaire, en sueur debout devant des barrages de la police.

«Nous occupons les rues aujourd'hui pour dénoncer les dérives de ce pouvoir qui menace les acquis démocratiques obtenus par le peuple haïtien. Martelly menace nos libertés, s'il veut réinstaurer la dictature, il doit partir», a-t-il ajouté.

Des jeunes issus des quartiers pauvres de la capitale ont invectivé les policiers, les accusant de soutenir le pouvoir en dispersant la manifestation anti-gouvernementale.

«Je ne suis pas là pour demander le départ de Martelly. Cela ne servirait à rien. Toutefois, il doit prendre conscience de la situation du pays et réunir toutes les forces de la société pour changer le pays», a dit Hamad, un jeune Haïtien qui se présente comme un admirateur de l'ancien dirigeant libyen Mouammar Kadhafi.

La police a fait usage de gaz lacrymogène et a tiré en l'air pour disperser les manifestants qui voulaient s'approcher du palais présidentiel gardé par des policiers haïtiens et des Casques bleus de la Minustah, la mission de l'ONU dans le pays.

Des jeunes manifestants ont brandi des portraits de M. Aristide, toujours populaire dans les quartiers pauvres de Port-au-Prince.

En mai dernier, il avait été entendu comme témoin dans l'enquête sur l'assassinat d'un journaliste en 2000, l'occasion pour ses partisans de manifester aux portes du tribunal.

Jean-Bertrand Aristide a dirigé Haïti à deux reprises: une première fois entre 1991 et 1996, mais son mandat avait été interrompu dès la première année par un coup d'État militaire, avant de reprendre en 1994 après trois années d'exil aux États-Unis.

Il est ensuite revenu à la tête du pays en 2001 mais a été contraint de démissionner en 2004 avant de passer sept ans en exil en Afrique du Sud et de rentrer en Haïti en mars 2011.