Des dizaines de milliers de Brésiliens ont de nouveau manifesté samedi dans plus de 100 villes du pays, malgré la main tendue par la présidente Dilma Rousseff qui a promis la veille de s'atteler à l'amélioration des services publics, en particulier des transports.

Quelque 75% des Brésiliens soutiennent le mouvement historique de protestations, selon le premier sondage, publié samedi, sur la crise qui secoue le géant d'Amérique latine depuis bientôt deux semaines.

Les promesses de la présidente de gauche ont été accueillies avec scepticisme sur les réseaux sociaux, par les jeunes généralement issus de la classe moyenne qui animent ce mouvement très hostile aux institutions.

À Belo Horizonte (sud-est), la troisième ville du pays, 70 000 personnes ont manifesté en marge du match Japon-Mexique (1-2) de la Coupe des Confédérations.

La police a tiré des gaz lacrymogènes sur des manifestants qui voulaient forcer le périmètre de sécurité autour du stade et ont jeté des pierres sur les forces de l'ordre.

Quinze personnes ont été blessées, dont quatre policiers, et deux manifestants tombés d'un viaduc qui sont dans un état grave, selon la police. «Nous sommes contre le Mondial parce qu'il masque les problèmes du pays», a déclaré à l'AFP Leonardo de Melo, un musicien de 23 ans lors de cette manifestation. Plus tard il y a eu des pillages de boutiques et d'un concessionnaire automobile dans le quartier de Pampulha et un véhicule a été incendié près de l'aéroport. La police a annoncé l'arrestation de 22 personnes pour vandalisme.

«Contre la corruption»

Au stade de Salvador de Bahia (nord-est), des dizaines de partisans disséminés dans les tribunes ont brandi à bout de bras avant les hymnes du match Brésil-Italie (4-2) des pancartes où l'on pouvait lire: «Descendons dans la rue pour changer le Brésil», ou encore: «Ce n'est pas contre la sélection, c'est contre la corruption».

Dans les rues de Salvador quelques centaines de personnes seulement, bien moins que prévu, ont manifesté, selon un journaliste de l'AFP sur place. Mais des abribus ont été détruits par des vandales.

À Sao Paulo, mégapole et poumon économique du pays, 35 000 personnes ont protesté dans une ambiance familiale, la plupart contre un projet de réforme constitutionnelle (PEC37) prévoyant de retirer le pouvoir d'enquêter aux parquets, souvent perçus dans le pays comme des acteurs efficaces contre la corruption.

À Santa Maria (sud), une ville où l'incendie d'une discothèque avait tué 242 jeunes en janvier, 30 000 personnes ont défilé.

Enfin dans le quartier ultra-chic de Leblon à Rio, une quarantaine de manifestants ont protesté pacifiquement devant le domicile du gouverneur Sergio Cabral. Certains y ont planté des tentes dans l'intention d'y camper, imitant les «Indignés» espagnols.

Mais quand même pour le Mondial

Les Brésiliens sont 75% à soutenir le mouvement, selon un sondage de l'institut Ibope publié samedi par la revue Epoca.

Le prix et la piètre qualité des transports en commun arrivent en tête des motifs de mécontentement (77%), devant la classe politique (47%) et la corruption (33%).

Les manifestants sont souvent très critiques envers les sommes colossales dépensées pour l'organisation de la Coupe Fifa des Confédérations - qui se dispute jusqu'au 30 juin - et du Mondial en 2014.

Mais le coeur des Brésiliens balance, entre ces critiques et leur amour viscéral pour le football. Ils approuvent à 67% l'organisation au Brésil, que la «Seleçao» a remporté cinq fois dans son histoire, alors que 29% sont contre.

L'onde de choc des protestations brésiliennes à atteint Hollywood: l'acteur américain Brad Pitt a renoncé à assurer lundi à Rio la promotion de son film World war Z en raison des événements en cours.

«Toute l'équipe du film World war Z adresse son respect et sa considération au peuple brésilien dans ce moment d'inquiétude et de réflexion que traverse le pays», a indiqué dans un communiqué la Paramount.