Alberto Rotondo n'a jamais donné l'ordre d'assassiner les opposants à un projet minier de Tahoe Resources au Guatemala et les journaux «peuvent bien continuer à dire ce qu'ils veulent sur nous», a pesté hier Ira Gostin, vice-président aux relations avec les investisseurs de la minière canadienne, au coeur d'une controverse qui fait couler beaucoup d'encre en Amérique du Sud.

«Nous ne poursuivrons pas [en justice] le journal, qui ne fait pas de journalisme de toute façon. On n'y rapporte pas une information exacte», a lancé M. Gostin sur un ton excédé, balayant du revers de la main les allégations du quotidien Siglo 21, qui soutient qu'Alberto Rotondo, chef de la sécurité à la mine de San Rafael, a ordonné que les «fils de putes» que sont les opposants à la mine qu'il supervise soient tués.

Selon Siglo 21, un enregistrement des propos que M. Rotondo aurait adressés à son fils et à un responsable de la sécurité et de la surveillance médiatique, Juan Pablo Oliva, a été dévoilé par le ministère public mercredi, lors d'audiences sur les conflits miniers dans la ville de San Rafael Las Flores, au sud-est du Guatemala.

»Des chiens maudits»

«Des chiens maudits qui ne comprennent pas que la mine génère du travail. Nous devons éliminer ces animaux... Nous ne pouvons pas permettre à la population de former une résistance, pas un autre Puya», aurait déclaré M. Rotondo, en référence à «La Puya», un campement érigé il y a plus d'un an pour marquer l'opposition populaire à des projets aurifères à proximité de Guatemala City. Toujours selon Siglo 21, le haut dirigeant de Tahoe Resources aurait demandé que la scène du crime qu'il aurait prétendument commandé soit nettoyée et le rapport de police, falsifié.

Chez la minière vancouvéroise, on assure qu'il n'a jamais été question de tuer des gens. «C'est une question stupide, et on ne fait pas de blagues avec ça, a déclaré Ira Gostin. J'ai parlé à l'avocat qui était sur place, et il [M. Rotondo] n'a jamais dit ça.» M. Gostin a insisté sur l'engagement qu'a pris Tahoe Resources à construire une mine «de manière responsable» et à «prendre soin de ses employés», dont 96 % sont guatelmatèques dans ce projet.

Appréhendé à l'aéroport

Alberto Rotondo a été appréhendé à l'aéroport La Aurora, un lieu qui a laissé croire à certains médias qu'il tentait de fuir le pays. Selon Siglo 21, c'est une conversation avec son fils, à qui il a donné les détails de son vol, qui a permis aux autorités de le repérer. «Il a été détenu à l'aéroport, a affirmé Ira Gostin. Il ne faisait que prendre un congé. Les expatriés ont droit à des vacances à l'extérieur du pays [où ils travaillent].»

Tahoe Resources estime être en mesure de produire 20 millions d'onces d'argent par année grâce au projet minier Escobal, situé à trois kilomètres de San Rafael Las Flores. La minière doit entrer dans la phase d'exploitation commerciale au début de l'année 2014, selon ce qu'elle a indiqué dans ses états financiers du quatrième trimestre, dévoilés hier. «La construction et le développement sous-terrain du projet Escobal sont à temps et respectent le budget», a écrit Tahoe Resources dans le même document, où l'on apprend également que ses revenus ont totalisé 24,9 millions pendant le trimestre qui s'est terminé le 31 mars.

Sur le terrain, les manifestations contre le développement minier n'ont cessé de s'intensifier, si bien que le gouvernement du Guatemala a déclaré l'état d'urgence au début du mois. La mine de San Rafael dérange, car elle affecterait les réserves d'eau des populations locales, selon ce que rapportent les médias locaux.