L'ex-dictateur haïtien Jean-Claude Duvalier, poursuivi par la justice de son pays pour corruption, concussions et détournement de fonds, ne s'est pas présenté jeudi devant le tribunal qui l'avait convoqué, a constaté l'AFP.

Après une séance marquée par des joutes verbales entre les avocats de M. Duvalier et d'anciennes victimes réclamant justice, le juge du tribunal d'appel a reporté la convocation au 21 février, exigeant une nouvelle fois que l'ancien dictateur se présente en personne, a-t-on appris de source judiciaire.

«Où est Duvalier? Pourquoi n'est-il pas au tribunal? Est-il au-dessus des lois?, a demandé en colère Robert «Boby» Duval, qui avait fait plusieurs années de prison sous la dictature.

«Duvalier ne veut pas se soustraire à la justice, il veut avoir la conviction que la règle de droit est respectée par nos magistrats», a réagi Me Frizto Canton, un des avocats de M. Duvalier.

«Arrêtez, jugez, condamnez Duvalier!», scandaient de jeunes manifestants devant le tribunal dans le centre de Port-au-Prince.

«Jean-Claude a fait du bien à Haïti, il n'a tué personne. Quand il était au pouvoir la vie n'était pas aussi chère qu'elle l'est aujourd'hui. Le pays a été détruit depuis son départ», rétorquaient en face un groupe de partisans de «Baby Doc», surnom de l'ancien président à vie.

Convoqué le 7 février, date à laquelle il avait été chassé du pouvoir en 1986 par un soulèvement populaire, M. Duvalier, héritier d'une dictature de près de trente ans (1957-1986) et revenu au pays en janvier 2011, s'est fait représenter par ses avocats qui ont remis une lettre de leur client expliquant son absence.

Dans cette lettre, M. Duvalier se plaint d'une confusion dans le dossier et soutient que le tribunal «prend position en faveur de la partie civile».

«Il y a une certaine confusion de rôle et d'attribution qui mérite d'être éclaircie», écrit-il dans le document dont des extraits ont été lus à l'AFP. «Je sollicite la lumière des membres de la Cour d'appel sur des objections soulevées par mes avocats».

La défense de l'ancien homme fort d'Haïti avait notamment contesté la qualité d'un groupe d'anciennes victimes de la dictature qui se sont constituées partie civile.

Un des avocats de M. Duvalier avait estimé «imprudent» de la part du juge de le convoquer un 7 février. «Cette date porte trop de ressentiments, trop de rancoeur, et trop d'émotions de part et d'autre», avait soutenu Frizto Canton.

Ce dernier a rejeté les accusations contre son client, selon lui «frappées de nullité». «Duvalier a été déjà jugé en France, en Haïti et en Suisse, il ne peut pas être jugé une nouvelle fois», a-t-il déclaré, ajoutant que «les magistrats semblent se retrouver sous l'influence d'une volonté extérieure».