Des dizaines de milliers de partisans du président Hugo Chavez, hospitalisé depuis près de sept semaines à Cuba, se sont massés mercredi dans les rues de Caracas, et cette véritable démonstration de force du gouvernement a éclipsé un petit rassemblement de l'opposition.

Arborant drapeaux et de portraits à l'effigie de M. Chavez et portant chemises et casquettes rouges du parti au pouvoir, des milliers de manifestants venus de plusieurs régions du Venezuela ont gagné le centre et l'ouest de la capitale, répondant à l'appel à «prendre Caracas» lancé mi-janvier par le Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV, au pouvoir).

Les rangs des cortèges n'ont cessé de grossir au cours de la journée, revêtant de rouge plusieurs avenues menant au quartier populaire du «23 janvier», vers lequel convergeaient les marcheurs. Ce rassemblement semblait avoir autant mobilisé que la grande marche du 10 janvier, au cours de laquelle les partisans d'Hugo Chavez avaient juré fidélité au président, muet et invisible depuis son départ à Cuba le 10 décembre.

Le 23 janvier correspond à la fin du régime dictatorial de Marcos Perez Jimenez en 1958, qui avait marqué le retour de la démocratie au Venezuela.

«L'objectif (de cette marche) est de confirmer l'engagement du peuple envers le président Chavez pour l'appuyer (...) et pour qu'il sache que, dans le monde, cette graine qu'il a semée continue et continuera» de pousser, a affirmé à l'AFP Audrey Ramirez, une employée de banque âgée de 43 ans.

Présent dans un des cortèges, le vice-président Nicolas Maduro, dauphin désigné du président Chavez, a rappelé devant des journalistes qu'en 1958, «le peuple avait été gagné par un grand espoir» selon lui «trahi» par «la bourgeoisie et l'impérialisme américain».

«Allons vers le socialisme, vers le vrai bonheur et la vraie démocratie!», s'est-il exclamé avant de reprendre sa marche.

Parallèlement, la coalition de l'opposition, la Table de l'unité démocratique (MUD), n'a rassemblé que 2000 personnes dans le gymnase d'un parc de l'est de Caracas, a constaté un journaliste de l'AFP. La MUD a en effet finalement préféré n'organiser qu'une petite manifestation, contrairement à son intention initiale, et qu'elle se déroule à bonne distance de celle du parti au pouvoir, afin d'«éviter toute confrontation».

Le secrétaire exécutif de la MUD, Ramon Guillermo Aveledo, y a dénoncé «un régime politique à vocation autoritaire».

Selon l'opposition, la loi fondamentale a été violée avec le feu vert donné le 9 janvier par le Tribunal suprême de justice (TSJ) au report au-delà de la date prévue par la Constitution de la prestation de serment de M. Chavez.

«Le gouvernement dit que le président marche, que le président fait des plaisanteries. Pourquoi (ce dernier) ne s'adresse-t-il pas au pays pour rassurer ses partisans et les Vénézuéliens ?», s'est pour sa part demandé le chef de l'opposition vénézuélienne Henrique Capriles au rassemblement de la MUD.

L'atmosphère politique s'est tendue ces dernières semaines au Venezuela. L'opposition se plaint de fréquentes invectives du gouvernement, cependant que le pouvoir affirme régulièrement que des coups d'État sont fomentés par des opposants de l'intérieur et de l'extérieur, présentés comme une «extrême droite» téléguidée par des opposants basés aux États-Unis.

«Nous suivons depuis quelques semaines déjà des groupes qui se sont infiltrés dans le pays et qui ont pour objectif d'attenter à la vie de Diosdado Cabello (le président de l'Assemblée nationale, ndlr) et à ma propre vie», a cet égard assuré M. Maduro devant les manifestants favorables à M. Chavez, sans fournir plus de détails.

M. Maduro, accompagné du ministre du Pétrole, Rafael Ramirez, s'est ensuite à nouveau rendu à Cuba mercredi soir pour y rencontrer M. Chavez, selon un communiqué officiel publié à La Havane.

Depuis qu'il est à Cuba pour y être opéré une quatrième fois d'un cancer dans la zone pelvienne, le président est muet et invisible, tandis que la nature et la localisation exactes de son cancer sont toujours tenues secrètes. Avant son départ, il avait délégué une partie de ses pouvoirs à M. Maduro.

Le dernier communiqué médical publié le 13 janvier affirmait que l'état de santé de M. Chavez, au pouvoir depuis 1999, avait évolué de manière «favorable». Mardi, le gouvernement avait parlé de nouvelles «encourageantes».