La victoire confirmée du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI) lors de la présidentielle mexicaine risque de relancer les divisions de la gauche entre partisans d'Andres Manuel Lopez Obrador, qui pourrait tenter une troisième candidature en 2018, et une aile plus modérée.

La validation vendredi à l'unanimité par le Tribunal électoral fédéral de l'élection d'Enrique Peña Nieto constitue une nouvelle défaite pour M. Lopez Obrador, après celle de 2006, perdue de justesse contre le président conservateur sortant, Felipe Calderon.

La grande question pour la gauche est aujourd'hui de savoir «si Lopez Obrador va se retirer ou s'il va se maintenir comme le leader indiscutable de la gauche mexicaine», explique l'analyste politique Denise Dresser dans le quotidien Reforma.

Pour José Antonio Crespo, chercheur du Centre de recherche et d'enseignement économiques, le candidat vaincu de la gauche est loin d'avoir l'intention de se retirer. Selon lui, la demande d'invalidation de l'élection de son adversaire était un premier pas vers une nouvelle candidature en 2018.

«Le fondement juridique était très faible, mais le message médiatique et politique pour ses partisans est très efficace. Cela reflète l'intention de M. Lopez Obrador de continuer d'être un leader au sein du PRD (Parti de la révolution démocratique), même de manière informelle et de rechercher la candidature en 2018», estime M. Crespo dans un entretien à l'AFP.

Pour l'analyste, l'histoire se répète. En 2006, après avoir perdu de 0,56% des voix l'élection contre Felipe Calderon, M. Lopez Obrador a continué à être présent sur l'échiquier politique pendant six ans, en sillonnant tout le pays en sa qualité, proclamée par ses partisans, de «président légitime» du Mexique.

Après ce nouvel échec, selon M. Crespo, «nous allons voir une gauche divisée, une partie acceptant les résultats (de l'élection présidentielle), disposée à négocier (au niveau parlementaire), et une autre, celle des partisans de M. Lopez Obrador, les accusant de trahison».

Mais cette fois-ci, à la différence de 2006, M. Lopez Obrador sera «plus affaibli»: la différence de voix est de plus de six points de pourcentage et les affirmations de fraude à propos de l'élection sont cette fois peu étayées.

M. Crespo, comme M. Dresser, voit une gauche divisée entre un courant qui cherche à se donner une image modérée, avec le maire sortant de Mexico, Marcel Ebrard comme atout fort pour 2018, et une aile plus radicale déjà mobilisée pour une troisième candidature de M. Lopez Obrador.

Pour M. Dresser, le candidat doublement défait devrait désormais se contenter d'être un «leader moral», ou la «conscience politique» d'une gauche qui doit maintenant se trouver «d'autres dirigeants plus innovateurs, plus visionnaires, plus libéraux, plus socio-démocrates».

M. Ebrard s'était retiré de la course présidentielle de cette année après avoir accepté de jouer le jeu de sondages internes à la gauche, gagnés de justesse par Lopez Obrador en novembre 2011.

Mais aujourd'hui, le maire de Mexico, dont le mandat se termine début décembre, ne cache pas ses ambitions. Il a expliqué ces jours derniers qu'il entend jouer un rôle pour maintenir «la cohésion politique» de la gauche afin qu'elle «ne perde pas sa position de deuxième force politique», puis s'est déclaré prêt à constituer un «large front» pour que la gauche gagne en 2018.