L'armée colombienne a réussi à rayer d'un coup une «génération complète» de chefs des FARC, lors d'un raid mené en début de semaine dans l'est du pays, grâce à un agent infiltré dans la guérilla qui a subi un revers très rude, mais pas encore fatal.

Des bombardements dans la province de Meta ont tué lundi plus d'une trentaine de combattants et surtout six chefs du «bloc oriental» des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), l'un des principaux fronts de la rébellion marxiste fondée en 1964.

«Nous avons éliminé une génération complète de commandants qui avaient entre 10 et 20 ans d'expérience au sein de la guérilla», s'est félicité le ministre colombien de la Défense, Juan Carlos Pinzon.

«C'est un coup qui sort de l'ordinaire. En une seule opération, nous avons obtenu l'équivalent d'un travail de plusieurs années», a-t-il affirmé, lors d'une réunion avec les correspondants de la presse étrangère à Bogota.

Le «bloc oriental» des FARC, réparti sur plusieurs provinces dans l'est de la Colombie, rassemble près de la moitié des troupes de la guérilla, soit 4300 rebelles sur un total de 9200, selon un bilan officiel.

Le raid de l'armée avait été lancé, grâce aux informations données par un agent inflitré dans les rangs des FARC, dans la zone de Vista Hermosa où le groupe rebelle avait réuni un important camp de formation de commandants, à la suite de la disparition de plusieurs leaders.

La guérilla a en effet enregistré une série de revers avec la mort en 2008 de son porte-parole Raul Reyes, puis celle de son chef militaire Jorge Briceño en 2010 et de son numéro un Alfonso Cano en 2011, tous tués dans des bombardements.

«Dans une action désespérée, la guérilla a pris le risque de convoquer cette réunion pour essayer de combler les trous dans la chaîne de commandement», a expliqué, sous couvert d'anonymat, un haut responsable des services secrets de l'armée.

L'organisation de cette réunion a été découverte il y a trois mois par un espion enrôlé par la guérilla. Douze heures seulement avant l'assaut, cet agent infiltré, qui a survécu au raid -tient à préciser le ministère de la Défense- avait fourni à l'armée tous les détails sur ce campement des FARC.

«Cette fois, cela a été un pur travail d'intelligence, pas d'apport technologique extérieur», a confié le haut responsable, en référence à l'aide matérielle apportée par les États-Unis.

«C'est un coup incontestablement très dur dans une zone historique des FARC, qu'elles utilisaient pour se replier», a affirmé à l'AFP Ariel Avila, enquêteur à l'institut Nuevo Arco Iris, spécialiste du conflit colombien.

Toutefois «l'impact de cette offensive est fort, mais localisé», a tempéré l'expert, soulignant que les six commandants abattus appartenaient au second cercle, qui en comporte une soixantaine, et non à l'état-major de la guérilla. Avec eux, d'autres chefs locaux, dont le neveu de Briceño, ont été tués.

Ce succès militaire survient quelques jours après une autre offensive qui a causé des pertes similaires aux rebelles près de la frontière avec le Venezuela.

Cela pourrait aboutir, estime M. Avila, à «une vague de démobilisations» au sein de la guérilla et la «dissuader de revenir vers l'intérieur» du pays, dont elle a été chassée par l'armée.

Depuis le début de l'année, les FARC ont perdu 600 membres, qui ont été abattus ou capturés ou qui ont déserté, selon le gouvernement. En dix ans, ses effectifs, essentiellement repliés dans les montagnes et les forêts, ont été divisés par deux.