Un dirigeant communautaire de la Rocinha, la plus grande favela de Rio, a été assassiné lundi, portant à six les meurtres pour règlement de comptes dans cet ex-bastion du trafic de drogue reconquis par l'armée en novembre, un signe que les trafiquants tentent de récupérer leur territoire, selon la police.

Vanderlan Barros de Oliveira, connu comme «Feijao», 41 ans, a été assassiné par balle alors qu'il faisait l'objet d'une enquête pour liens présumés avec le trafic de drogue.

«L'exécution est claire. Nous arriverons rapidement à l'auteur du crime», a déclaré le commissaire Rivaldo Barbosa qui a convoqué treize témoins.

Dans un communiqué, la police a admis qu'elle «avait détecté au cours des dernières semaines des tentatives de la part des criminels pour récupérer le territoire perdu» lors de la pacification de la Rocinha, la 19e favela à être reprise aux narcotrafiquants qui y faisaient la loi depuis 30 ans.

Un renfort de 130 policiers y a été dépêché mardi, selon le communiqué.

Feijao (littéralement «haricot noir») était le président de l'association des habitants située dans la partie basse de cette favela, située en pleine zone touristique et où vivent plus de 120 000 personnes. Il venait de sortir d'une réunion au siège de son association quand il a été tué de trois balles tirées à bout portant par un homme à pied et portant un casque.

Le dirigeant communautaire faisait l'objet d'une enquête de la police fédérale qui cherche à démanteler le réseau financier du chef du trafic de drogue de la Rocihna, Antonio Bonfim Lopes, alias «Nem», de la faction «Amis des Amis». Ce dernier a été arrêté le 9 novembre dans le coffre d'une voiture alors qu'il tentait d'échapper à la police qui resserrait l'étau sur la plus grande favela de la ville avant sa reconquête imminente.

Feijao est la sixième personne assassinée dans la Rocinha depuis sa pacification et toutes étaient liées au trafic de drogue, selon la police. Il est accusé d'être le trésorier de Nem et devait comparaître le 3 avril devant un tribunal de Rio pour blanchiment d'argent et formation de bande armée.

La police estime que Feijao a été victime d'un règlement de comptes entre des factions rivales se disputant la succession de «Nem». L'une des hypothèses est qu'un dénommé «Canelao» de la faction «Commando Rouge» soit impliqué dans le meurtre de Feijao.

«Ces meurtres montrent que la Rocinha est un territoire où il y a encore beaucoup de conflits. Après tant d'années de domination (des trafiquants), il est difficile d'en reprendre le contrôle. Il n'y a pas encore de présence suffisante de l'État avec des politiques sociales. La police ne suffit pas», a déclaré à l'AFP mardi le député de Rio Marcelo Freixo qui a enquêté sur les milices.

Mardi par ailleurs, quelque 750 policiers d'élite ont commencé à remplacer l'armée dans deux des douze favelas du Complexo do Alemao, ancien bastion des narcotrafiquants au nord de Rio, reconquis fin 2010.

Cette opération précède l'installation d'une Unité de police pacificatrice (UPP), une unité spécialement formée pour assurer l'ordre dans les favelas pacifiées.

Les autorités ont lancé depuis 2008 de vastes opérations pour pacifier les favelas avant les compétitions sportives du Mondial 2014 de football et des Jeux olympiques de 2016.