Cynthia Vanier pourra-t-elle profiter de la décision qui sera rendue cette semaine par le plus haut tribunal mexicain dans l'affaire Florence Cassez? Pour rappel, la consultante canadienne spécialisée dans la résolution des conflits, qui a été arrêtée le 10 novembre dernier à Mexico, est accusée d'avoir organisé un complot pour faire entrer illégalement dans ce pays Saadi Kadhafi, fils de l'ex-leader libyen.

La Cour suprême mexicaine débattra aujourd'hui de la possibilité de relâcher Florence Cassez, condamnée à 60 ans pour enlèvements. Les multiples irrégularités qui ont entaché l'enquête pourraient amener les juges à innocenter la Française. Lors de son arrestation en 2005, les instances judiciaires avaient attendu deux jours avant de prévenir le consulat français de l'interpellation. Ce délai, qui excède la limite légale, pourrait ouvrir la porte à sa libération.

Paradoxalement, le Mexique s'est distingué par son combat acharné dans la défense des droits consulaires de ses propres ressortissants à l'étranger. En 2003, le gouvernement a porté plainte contre les États-Unis et obtenu gain de cause devant la Cour internationale de justice pour violations de la protection consulaire, dérivée de la convention de Vienne, dans le cas de 52 Mexicains passibles de la peine de mort.

«Ce qui est étonnant, c'est que le gouvernement actuel tente de minimiser l'impact des violations consulaires dans le cas de Florence Cassez, alors que le Mexique est le pays du monde qui a le plus intérêt à défendre le respect de ces droits. Car c'est le pays dont la proportion de la population vivant à l'étranger est la plus importante, environ 11% des Mexicains», explique en entrevue avec La Presse Jorge Castañeda, ex-ministre des Affaires étrangères, qui avait promu la plainte en 2003. M. Castañeda a publiquement pris parti pour la libération de Florence Cassez.

Le cas de Cynthia Vanier est plus grave encore: le ministère public fédéral a mis quatre jours à prévenir l'ambassade du Canada et à permettre l'assistance consulaire. «Sur le plan juridique, la décision de la Cour suprême ne concerne que Florence Cassez et ne toucherait pas Cynthia Vanier. Mais politiquement, il sera intenable pour le Mexique de minimiser la violation de ces droits. Le Canada pourrait invoquer ce précédent et dénoncer notre hypocrisie», analyse Jorge Castañeda. Une suggestion lancée au gouvernement canadien, qui est resté très discret dans cette affaire?

Le président plongé dans la mêlée

Le président mexicain Felipe Calderon a pris position, au nom du «droit des victimes», contre la libération de Florence Cassez. Inaugurant un complexe pénitentiaire de l'est du Mexique, le chef de l'État a estimé lundi soir que la justice supposait «l'obligation élémentaire que celui qui a commis un délit soit, véritablement, jugé et châtié et que jamais l'interprétation de la loi ne soit la brèche par laquelle passe l'impunité». Hier, l'avocat mexicain de Florence Cassez, Me Agustin Acosta, s'est déclaré «surpris» de l'intervention de M. Calderon qui «envoie clairement un message à la Cour suprême, ce qui représente une rupture avec tout l'esprit de la division des pouvoirs».

- Avec AFP