Vingt et un cadavres disséminés dans les rues de Morelia, treize pensionnaires d'un centre de désintoxication abattus à Torreon: la violence liée au trafic de drogue ne faiblit pas au Mexique où une caravane pour la paix veut faire entendre le ras-le-bol de la société civile.

À Morelia, la capitale de l'État mexicain du Michoacan (centre), située à 200 km à l'ouest de Mexico, 21 corps ont été retrouvés, abandonnés dans la nuit de mercredi à jeudi en différents endroits.

Cinq cadavres étaient empilés les uns sur les autres dans le port de Buenavista, cinq bâillonnés à une sortie de la ville, trois ont été retrouvés sur un terrain de football, trois derrière un hôtel et cinq autres ailleurs. Il s'agit «en majorité de jeunes de 25 à 30 ans», a dit le procureur de l'État du Michoacan à l'AFP.

Contrairement aux habitudes, le procureur a révélé le contenu des messages d'avertissement abandonnés sur les cadavres: «Parce que la société le demande, ceci va arriver à ceux qui continuent de cambrioler les maisons, aux kidnappeurs et aux violeurs».

Relier les défunts à des crimes et des délits est une méthode classique des cartels de la drogue pour décrédibiliser leurs victimes.

Mardi dans la ville de Torreon (nord), plusieurs hommes armés étaient arrivés en fin d'après-midi devant un centre de désintoxication pour drogués et alcooliques.

Ils étaient entrés dans le bâtiment, puis avaient froidement ouvert le feu sur les patients qui s'y trouvaient. Onze personnes étaient mortes sur le coup et deux autres des suites de leurs blessures.

Cinq attaques avaient déjà eu lieu en 2010 contre des centres de désintoxication, dont une qui avait fait 19 morts. Selon les autorités, les cartels de la drogue s'attaquent ainsi aux petits revendeurs qui s'y seraient réfugiés.

14 corps -12 hommes et 2 femmes- ont également été découverts mercredi et jeudi dans huit fosses communes à Acapulco, selon les autorités de l'État de Guerrero (sud).

Morelia, Torreon: ces deux villes sont situées sur le parcours de la «caravane de la consolation», organisée à l'initiative du poète et journaliste Javier Sicilia, dont le fils a été assassiné en mars avec six autres personnes, à Cuernavaca, à 90 km au sud de Mexico.

La caravane, composée d'une vingtaine d'autocars, est partie samedi de Cuernavaca (centre) pour gagner en six jours la frontière avec les États-Unis, avec des étapes dans les villes les plus touchées par la criminalité.

Jeudi, la caravane est arrivée dans la ville de Chihuahua, capitale de l'État du même nom.

Javier Sicilia devait y dévoiler une plaque à la mémoire de la vingtaine de militants des droits de l'Homme assassinés depuis 2006, date à laquelle le président mexicain Felipe Calderon a déclenché une offensive avec l'appui de 50 000 militaires contre les narcotrafiquants, qui se disputent le contrôle des routes notamment vers les États-Unis.

Cette offensive a fait plus de 37 000 morts depuis fin 2006.

Au Chihuahua, les militants ne craignent pas uniquement le crime organisé. À la fin de la semaine dernière, des policiers ont perquisitionné sans ménagement et, semble-t-il sans mandat, au siège du centre des droits de l'Homme Paso del Norte dans la ville de Ciudad Juárez, celle du Mexique connaissant le plus de violences. En 2010, on y a compté 3100 homicides.

«Chihuahua et Ciudad Juárez sont des espaces emblématiques de l'incapacité de l'État à protéger, et de l'action criminelle de la délinquance», a dit à l'AFP Emilio Alvarez, ombudsman de la ville de Mexico.

C'est à Ciudad Juárez, à la frontière avec les États-Unis, que doit être signé vendredi un pacte civil contre la violence. Samedi, la caravane traversera la frontière pour El Paso, où est prévue une manifestation commune avec des organisations des États-Unis.