Emblème de la réforme lancée à Cuba pour sauver une économie au bord de la faillite, l'entreprise privée passe par 178 petits métiers dont l'ouverture aux travailleurs indépendants vise à créer une nouvelle culture de service au sein d'un système où l'État est omniprésent.

Cette litanie de petits métiers ouverts aux Cubains qui veulent se mettre «à leur compte» («cuenta propia») recouvre des activités parmi les plus pointues - «tapisseur de boutons» - aux plus générales - «artisan».

Plus de 85 000 Cubains ont déjà retiré une licence qui leur donne le droit d'exercer, moyennant le paiement d'un impôt et d'une cotisation sociale qui ouvrira un droit à une retraite.

Quelque 20% de ces nouveaux «cuentapropistas», travailleurs indépendants, ont choisi la restauration: un petit restaurant («paladar») à domicile, une cafeteria (boissons sans alcool et snacks) ou un système de vente ambulante et de livraison à domicile.

Une part à peu près égale de licences concerne des «employés sous contrat» qui seront embauchés par les «cuentapropistas» eux-mêmes.

Visant le tourisme, les «loueurs d'appartement, chambre ou espace faisant partie de l'habitation» seront également nombreux.

Les autres? L'éventail des petits métiers est large. Certains resteront anecdotiques: le «montreur de chiens dressés», la «Havanaise» ou le «dandy» arpentent la vieille ville de La Havane à la chasse au touriste en quête de photos pittoresques.

De nombreux autres métiers concernent la campagne et les activités agricoles: «charretier», «brouettier», «fabricant d'attelage», «tondeur de moutons», «puisatier», «meunier», voire «élagueur de cocotiers».

Les «réparateurs» exerceront dans dix-huit secteurs différents: bicyclettes, appareils électriques et électroniques, parapluies, matelas, machines à coudre...

Un de ces réparateurs sera même dédié aux briquets jetables, qui loin d'être jetés, sont réparés, révisés et remplis par des spécialistes qui posent leur étal sur les trottoirs des grandes villes cubaines.

Les transports sont également bien couverts avec les chauffeurs de «camions», camionnettes», «fourgonnettes», «autobus», «minibus», «taxis», «motos», «tricycles», «jeeps», «embarcations» et même «engins ferroviaires».

Sans compter les «services de voiture pour enfants à traction animale» et les engins à «traction humaine».

Parmi les valeurs sûres, figurent les: «coiffeur», «maçon», «menuisier», «modiste ou tailleur» et autres «plombier» et «électricien». D'autres catégories couvrent de vastes champs d'activités: «photographe», «décorateur» ou simple «artisan».

Pourtant, il ne s'agit généralement pas de créations nettes d'emplois. Les autorités admettent que la plupart de ces licences ne font que régulariser des situations de fait qui flirtaient avec l'illégalité.

Au-delà, Ariel Terrero, le plus réputé des économistes cubains ayant accès aux médias officiels, soulignait récemment que la petite entreprise n'était pas une «potion magique» pour l'économie cubaine.

Les activités privées, a souligné l'économiste, «ne vont pas résoudre les problèmes de qualité, de productivité ou de développement des forces productives» de l'économie cubaine.

Et de souligner que le vrai test viendrait avec la mise en oeuvre des autres mesures projetées par le gouvernement: création de coopératives urbaines, plus grande autonomie accordée aux grandes entreprises d'Etat, fin de nombreuses subventions et des aides d'Etat à des secteurs de l'économie.