Depuis qu'il a succédé il y a trois ans à son frère Fidel au pouvoir à Cuba, Raul Castro a enclenché un programme de réformes économiques encore balbutiant et s'est lancé dans un processus de libération des prisonniers politiques qui ne fait pas taire les critiques internationales.

À 79 ans, et entouré de dirigeants de la même génération, Raul Castro s'est efforcé depuis son élection à la présidence le 24 février 2008 de rassembler les Cubains autour d'un «consensus nécessaire» pour réformer une économie au bord du gouffre.

À l'issue d'un long processus de consultations populaires, c'est le Parti communiste de Cuba (PCC) qui devrait approuver un plan de réforme économique en 291 points lors de son très attendu 6e Congrès - le premier depuis 1997 - qui se réunira à La Havane du 16 au 19 avril.

Réduction des effectifs pléthoriques du secteur public, autonomie des entreprises d'Etat, création de coopératives urbaines, introduction du secteur privé dans certains métiers et ouverture à l'investissement étranger sont les points-clés du programme qui vise à sortir l'économie cubaine du modèle soviétique dans lequel elle s'est sclérosée pendant des décennies.

Mais du million de suppressions d'emplois dans le secteur public -dont 500 000 d'ici la fin mars-, des règles d'autonomie des entreprises d'Etat ou de la création de coopératives, aucun détail n'a filtré et aucune information n'a été rendue publique par les autorités.

Les 178 métiers qui ont été ouverts au secteur privé ne concernent pour le moment que moins de 100 000 personnes qui ont souvent choisi la «cuenta propia» (travail à son compte) pour régulariser leur situation.

Et les discussions populaires autour des réformes ont surtout révélé les inquiétudes des Cubains quant à la faiblesse de leurs revenus -salaire mensuel moyen de 15 à 20 euros- ou la disparition prévue de la «libreta», le carnet qui leur assure un approvisionnement en biens de base à très faible coût.

Le général Raul Castro a averti le Parlement en décembre: «ou nous agissons ou c'en est fini de marcher le long du précipice et nous y tombons».

Autre priorité stratégique, la production alimentaire. En trois ans, 1,2 million d'hectares de terres ont été distribuées en usufruit, mais le pays compte toujours 40% de ses terres cultivables en jachère et dépense chaque année 1,5 milliard de dollars en importations alimentaires.

L'Église catholique a exprimé son soutien aux réformes, après avoir déjà acquis une stature d'interlocuteur crucial des autorités en matière des droits de l'Homme, autre volet des avancées du gouvernement de Raul Castro.

Car la bienveillance et les investissements de la communauté internationale dépendront des progrès réalisés par Cuba à l'égard du respect des libertés individuelles et des droits de l'Homme.

Les autorités ont conclu à l'été 2010 avec l'Eglise catholique un accord de libération des prisonniers politiques qui s'est largement concrétisé. Des 52 détenus concernés par l'accord -sur 75 qui avaient été arrêtés et condamnés en mars 2003-, seuls six, qui refusent l'exil en Espagne en échange de leur liberté, restent encore incarcérés.

Une trentaine d'autres détenus condamnés pour «sabotage» ou «terrorisme» alors qu'ils s'efforçaient de quitter l'île ont également été libérés en échange d'un exil en Espagne.

Malgré ces libérations, la communauté internationale continue de dénoncer le «harcèlement» des autorités à l'égard des opposants.

Parmi eux, Guillermo Fariñas, prix Sakharov 2010 du Parlement européen pour la liberté de pensée qui a, encore une fois, été interpellé mercredi alors qu'il commémorait le premier anniversaire de la mort d'un détenu en grève de la faim.