Le dissident cubain Guillermo Farinas a été interpellé mercredi alors qu'il célébrait le premier anniversaire de la mort du prisonnier Orlando Zapata, dont le décès après 85 jours de grève de la faim avait ouvert la voie à une libération des détenus politiques.

L'opposition a de son côté dénoncé une campagne d'intimidation pour l'empêcher de célébrer l'anniversaire de la mort de Zapata, au lendemain de laquelle Fariñas avait lui-même entamé un jeûne qu'il avait cessé après 135 jours à l'annonce d'un accord sur la libération de prisonniers politiques.

Prix Sakharov 2010 du Parlement européen pour la liberté de pensée, Fariñas a été interpellé alors qu'il lançait des slogans anti-gouvernementaux à son domicile de Santa Clara, dans le centre de Cuba, a expliqué à l'AFP sa mère Alicia Hernandez.

«Il était monté sur la terrasse et célébrait le décès de Zapata. Deux policiers sont venus et l'ont emmené», a indiqué la mère de l'opposant qui avait déjà été interpellé brièvement à trois reprises fin janvier.

De son côté, le président de la Commission cubaine des droits de l'homme Elizardo Sanchez a signalé «46 interpellations arbitraires de courte durée et une cinquantaine d'assignations à résidence ces derniers jours dans toute l'île» pour dissuader l'opposition de célébrer cet anniversaire.

À La Havane, une trentaine de Dames en Blanc -épouses et proches de prisonniers- ont célébré l'anniversaire au domicile de leur leader Laura Pollan, sous les huées de quelque 200 manifestants pro-gouvernementaux brandissant des drapeaux cubains devant la porte de la maison.

En revanche, la mère d'Orlando Zapata a pu se rendre sans aucun incident avec une dizaine de membres de sa famille sur la tombe de son fils à Banes, à 50 km au nord de Santiago de Cuba, la grande ville du Sud cubain.

«Nous avons pu déposer des fleurs au cimetière, sans aucun problème. Ceux qui nous harcelaient ces derniers jours étaient bien cachés», a expliqué à l'AFP Reina Tamayo, qui avait elle-même été brièvement interpellée vendredi.

Orlando Zapata, un maçon de 42 ans, était mort dans un hôpital de La Havane, après un jeûne de 85 jours qu'il menait pour réclamer une amélioration des conditions de détention des prisonniers politiques.

Les autorités réfutent l'existence de prisonniers politiques et considèrent ces détenus comme des «mercenaires» à la solde des États-Unis ou des «délinquants» qui ont commis des délits de droit commun en tentant notamment de détourner des embarcations pour quitter l'île.

À la mort de Zapata, Guillermo Fariñas avait à son tour entamé une grève de la faim qu'il avait cessée 135 jours plus tard à l'annonce d'un accord sur la libération de 52 prisonniers politiques emprisonnés depuis 2003.

Ces 52 prisonniers faisaient partie d'un groupe de 75 opposants arrêtés et condamnés au printemps 2003, dont Orlando Zapata ne faisait pas partie.

Aujourd'hui, six de ces 52 prisonniers qui refusent de s'exiler en Espagne en échange de leur libération, restent incarcérés. Quarante ont pris le chemin de l'Espagne et six sont restés à Cuba.

Par ailleurs, 30 prisonniers condamnés pour «actes de piraterie» et «terrorisme» ont également été libérés en échange d'un exil en Espagne.

À Washington, le porte-parole du Département d'État Philip Crowley a dénoncé «l'intimidation et le harcèlement persistant par le gouvernement cubain contre les activités des militants (...) qui s'efforcent de promouvoir les droits de l'homme dans l'île».