En juin 2009, le Honduras a été le théâtre du premier coup d'État en Amérique latine en 20 ans. L'expulsion du président par l'armée a été suivie de protestations et de sanctions par une myriade de pays. Un an et demi plus tard, cependant, les résultats de ces pressions se font toujours attendre.

Il y a un an presque jour pour jour, un militant des droits humains au Honduras était abattu en pleine rue à Tegucigalpa. Dans une des villes les plus violentes du monde, sa mort aurait pu passer inaperçue. À un détail près: Walter Trochez avait lui-même prédit que quelque chose allait lui arriver.

Deux jours avant son assassinat, le jeune homme avait raconté à l'organisation Amnistie internationale qu'il avait été la cible d'un kidnapping raté le 4 décembre.

Des hommes masqués l'avaient obligé à monter dans une camionnette, l'avaient battu à répétition et l'avaient menacé. «Nous avons l'ordre de te tuer», aurait dit l'un des ravisseurs, selon le témoignage de la victime qui avait réussi à s'enfuir. Les hommes masqués, a-t-il rapporté, l'avaient interrogé au sujet du mouvement de résistance qui était né au lendemain du coup d'État du 28 juin 2009.

Militant pour les droits des gais, des lesbiennes et des transgenres, Walter Trochez était l'une des figures de proue de ce mouvement populaire qui demandait le retour au pouvoir du président élu Manuel Zelaya, arrêté et exilé par l'armée.

Un an plus tard, l'enquête mise en branle pour élucider le meurtre de M. Trochez a donné peu de fruits. La situation est la même dans la plupart des enquêtes entourant 17 autres meurtres et des dizaines de violations des droits humains qui auraient eu lieu après le coup d'État.

Efforts vains

«Le bureau du procureur responsable des droits humains a ouvert 20 enquêtes. Dans les 8 cas qui ont été devant les tribunaux, les accusés ont été acquittés, note Tamara Taraciuk, de l'organisation Human Rights Watch qui publie aujourd'hui un rapport sur les violations des droits humains au Honduras. Personne à ce jour n'a été tenu responsable des violences commises sous l'administration de facto mise en place après le coup d'État», ajoute-t-elle, en référence au gouvernement de Roberto Micheletti qui a remplacé celui de Manuel Zelaya jusqu'en janvier 2010.

Le 29 janvier dernier, Porforio Lobo a repris les rênes du pays après avoir remporté une élection organisée par l'administration Micheletti et boycottée par les partisans de Zelaya. Plusieurs pays latino-américains, dont le Brésil, le Nicaragua et le Venezuela, ne reconnaissent toujours pas sa légitimité.

Au cours de la dernière année, le président Lobo a tenté de mettre sur pied une commission-vérité et réconciliation sur les événements entourant le coup d'État, mais autant le camp Zelaya que celui des putschistes ont balayé ses efforts d'un revers de main.

Au cours des dernières semaines, il a affirmé chercher un moyen de ramener au pays l'ex-président Zelaya, exilé en République dominicaine depuis près d'un an. À ce jour, ses promesses restent lettre morte.

Grogne internationale

La situation hondurienne inquiète plus d'un acteur au sein de la communauté internationale.

À la mi-novembre, le procureur en chef de la Cour pénale internationale de La Haye, Luis Moreno-Ocampo, a ouvert une enquête sur des «allégations de torture massives» dans la foulée du coup d'État.

Le Comité pour la protection des journalistes a rapporté cette semaine dans un nouveau rapport que trois journalistes ont été tués depuis janvier 2010 au Honduras, en faisant l'un des pays les plus dangereux du monde pour la presse.

Le pays le plus pauvre d'Amérique centrale est aussi exclu de l'Organisation des États américains. Son expulsion a eu lieu au lendemain du renversement du gouvernement Zelaya.

Cette dernière mesure ne fait cependant pas l'unanimité. Analyste à la Fondation canadienne pour les Amériques, Lesley Burns estime que les sanctions prises à l'encontre du Honduras ont des effets pervers. «Depuis le début des sanctions, la violence et le crime ont augmenté au Honduras, note-t-elle. Beaucoup des enjeux auxquels le Honduras doit faire face sont transnationaux, dont la drogue et le crime organisé», expose l'analyste, en ajoutant qu'à ce jour, la population civile est la première victime des sanctions.