Au moins 81 détenus ont péri et 14 ont été grièvement blessés, dans la nuit de mardi à mercredi au cours d'un incendie provoqué par une rixe dans une prison surpeuplée et mal surveillée de Santiago, signe d'un système carcéral sous pression.

Des matelas incendiés au cours d'une bagarre ont «propagé le feu en moins de trois minutes», selon un détenu indemne contacté par téléphone par l'AFP, et qui a requis l'anonymat.

Le parquet à confirmé le caractère criminel de l'incendie. «Des éléments ont été trouvés qui attestent du caractère intentionnel de l'origine du feu», a déclaré à la presse le procureur Alejandro Pena, en charge de l'enquête.

La catastrophe dans la prison San Miguel accueillant environ 1900 personnes, soit mille de plus que sa capacité, est «sans doute la plus grave de l'histoire carcérale du Chili», selon le ministre de la Santé Jaime Manalich.

Aux abords de la prison, des centaines de proches de détenus se sont rassemblés tôt mercredi, jour férié au Chili, et donc de visites. Certains en larmes d'autres criant leur colère, ils tentaient en vain d'obtenir des nouvelles, a constaté l'AFP.

«Nous sommes plus de 600 ici, à ne pas savoir où sont nos enfants!», criait, désespéré, un père de détenu.

Un important contingent de police a très tôt été déployé, et a évacué des familles qui grimpaient sur des voitures en stationnement, criaient par-dessus les murs de la prison, tentant d'échanger des informations avec les détenus.

Le président Sébastian Pinera, s'exprimant face à la presse aux abords de la prison six heures après le sinistre, a fait état de 83 détenus tués, avec un total 21 blessés, dont 14 détenus dans un état grave.

Le préfet de la province de Santiago Fernando Echeverría a ensuite ramené par ce bilan à «81 morts».

Selon le ministre de la Santé, le bilan pourrait s'élever, le «pronostic vital étant engagé» pour plusieurs grand brûlés.

Outre les détenus, trois policiers et un pompier ont été blessés.

Plus de 200 prisonniers ont pu être évacués de l'aile incendiée.

Selon Luis Masferrer, le directeur de la police pénitentiaire, «tout a commencé par une bagarre entre détenus» dans la Torre 5, l'une des cinq sections de la prison.

La Torre 5 accueillait «en général des détenus considérés peu dangereux, nombre d'entre eux sous le coup d'une première condamnation», selon la Médiatrice publique Paula Vila qui a visité les lieux.

L'incendie s'est déclaré vers 05h30 locales, maîtrisé en moins de trois heures, seules quelques volutes de fumée restant visibles aux fenêtres du quatrième étage. Le feu a ravagé les 3e et 4e étages de cette section.

«C'est une tragédie immense et douloureuse (...) dont nous devons tirer les leçons. Nous ne pouvons continuer à avoir un système carcéral inhumain», a déclaré le président Pinera. «Il est déplorable depuis plusieurs décennies».

Il a révélé que seuls six surveillants étaient en poste dans l'établissement au moment de l'incendie, et 26 au total dans le périmètre de la prison.

Aux abords de la prison, des bousculades ont éclaté, dans la confusion de l'annonce d'une première liste de noms de détenus indemnes ou blessés.

La police a dû installer des barrières métalliques.

Peu à peu, les autorités ont appelé des familles à l'intérieur de la prison, pour communiquer des informations.

L'identification des corps, pour beaucoup calcinés, progressait lentement, une trentaine de victimes ayant été identifiées formellement à la mi-journée.

«Nous avons des assistantes sociales et des psychologues pour prendre soin des familles», a déclaré le directeur de la police pénitentiaire.

Pour lui, l'incendie reflète «la précarité du système carcéral chilien». «La surpopulation dans cette prison est un facteur qu'il faudra analyser», a-t-il ajouté.

«C'est lamentable, mais c'est la vérité: cinq personnes (sic) pour garder plus de 1900 détenus», a dénoncé Pedro Hernandez, président du syndicat des fonctionnaires pénitentiaires, affirmant que ces gardiens avaient «sauvé plus de soixante détenus».