L'épidémie de choléra qui sévit depuis la mi-octobre en Haïti semblait s'aggraver mercredi, le bilan s'alourdissant à 643 morts dans le pays où de nombreux déplacés du séisme de janvier vivent dans des conditions précaires risquant de favoriser la propagation de la maladie.

Le ministère de la Santé publique du pays le plus pauvre du continent américain a annoncé que la maladie très contagieuse était responsable du décès de 643 personnes et de 9971 hospitalisations. Le dernier bilan diffusé la veille faisait état de 583 morts et d'environ 9000 hospitalisations.

Sur la seule journée de mardi, 46 décès ont été recensés dans le département de l'Artibonite, région située dans le nord du pays qui abrite la ville des Gonaïves et d'où est partie l'épidémie, ont précisé les autorités dans un communiqué.

Mardi soir le maire des Gonaïves Adolphe Jean-François avait indiqué à l'AFP qu'une soixantaine de personnes étaient mortes en deux jours dans la ville, certaines ayant succombé en se rendant à l'hôpital.

«Des malades sont morts sur le chemin de l'hôpital, les cadavres sont enveloppés dans des couvertures et déposés près du cimetière de la ville», avait dit Adolphe Jean-François.

Tous les regards sont désormais tournés vers Port-au-Prince, où des centaines de milliers d'Haïtiens dorment dans des camps de fortune depuis le séisme du 12 janvier qui avait fait plus de 250 000 morts et 1,5 million de déplacés.

Les mauvaises conditions d'hygiène dans les camps font craindre une progression rapide de l'épidémie, présentée mardi comme «une question de sécurité nationale par le directeur général du ministère de la Santé haïtien, Gabriel Thimoté.

Le choléra a d'ores et déjà atteint la ville, mais pour l'heure, un seul décès et 115 hospitalisations ont été confirmées dans la capitale.

Dans l'ensemble du département de l'Ouest, où se trouve Port-au-Prince, 42 décès ont été enregistrés au total, selon le ministère de la Santé.

Le décès confirmé dans la capitale a été recensé à Cité-Soleil, quartier le plus pauvre de la ville. Il s'est produit à l'hôpital Ste-Catherine, tenu par Médecins sans Frontières-Belgique.

L'Organisation panaméricaine de la santé (OPS), émanation de l'OMS, a fait part mardi de sérieuses inquiétudes au sujet de l'évolution de la maladie dans la capitale.

«Port-au-Prince est un bidonville étendu où les conditions sont très mauvaises en matière d'installations sanitaires et d'eau. Ce sont des conditions optimales pour une propagation rapide du choléra», a indiqué le Dr Jon K. Andrus de l'OPS. «Nous devons nous tenir prêts».

La précarité dans de nombreux camps à travers le pays est en outre accentuée par les volumes d'eau - vecteur du choléra - accumulés lors du passage de l'ouragan Tomas en fin de semaine dernière.

Tomas, qui a fait 21 morts en Haïti, a en grande partie épargné Port-au-Prince mais le sud-ouest du pays a énormément souffert.

Ces inondations, ainsi que les nouveaux déplacements de population entraînés par l'ouragan, «multiplient» les risques de propagation du choléra, selon le Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l'ONU (OCHA).

Selon une projection établie par l'OPS en se fondant sur le précédent de l'épidémie de choléra apparue en 1991 au Pérou, l'épidémie de choléra actuelle pourrait faire jusqu'à 270 000 malades si elle se poursuit dans les années qui viennent.