L'épidémie de choléra qui a fait 292 morts en Haïti n'a pas atteint son «pic», a averti mercredi l'Organisation mondiale de la santé, au moment où des rumeurs sur l'origine du mal crispaient les relations entre une partie de la population et l'aide étrangère.

Une dizaine de jours après l'apparition de la maladie sur les rives de l'Artibonite, l'OMS a ravivé les craintes d'une intensification de l'épidémie.

«Je ne pense pas qu'elle est contenue», a déclaré le Dr Claire-Lise Chaignat, une responsable de l'OMS.

Elle a expliqué que l'OMS recommandait aux autorités de se préparer au «pire scénario», soit la possibilité de voir la bactérie se développer dans la capitale Port-au-Prince, où des centaines de milliers de personnes s'entassent dans des camps depuis le séisme du 12 janvier qui a fait plus de 250 000 morts.

L'avertissement tranche avec l'optimisme affiché dimanche par la ministre haïtienne des Affaires étrangères Marie Michèle Rey, qui s'était déclarée «confiante», affirmant que l'épidémie semblait «contenue».

«Je ne pense pas que nous avons atteint un pic», a renchéri la spécialiste de l'OMS, tout en relevant que le taux de létalité avait baissé, atteignant 7,7%, contre 10% au début de l'épidémie. «Cela montre que la réponse se met en place. C'est un signe positif».

La maladie a fait 292 morts, selon un bilan communiqué mercredi par les autorités haïtiennes, portant sur une période allant du 19 au 27 octobre.

Ces chiffres montrent une relative stagnation du nombre de nouveaux morts (huit) par rapport à mardi, mais une augmentation des nouvelles hospitalisations (535, pour un total de 4147).

L'origine de l'épidémie de choléra, éradiqué à Haïti depuis plus de cent ans, reste un mystère, alors que des rumeurs dans le pays mettent en cause des soldats népalais de l'ONU.

La Mission des Nations unies en Haïti (Minustah) a démenti: certains croient «que des matières organiques humaines jetées dans une rivière (...) par la Minustah sont à l'origine de l'épidémie (...), mais (la mission) utilise en fait sept fosses septiques».

Mme Chaignat a affirmé pour sa part qu'il était «absolument impossible» que la maladie ait été apportée par des humanitaires venant d'autres pays. Selon elle, ce n'est pas la première fois que le choléra apparaît dans un pays sans qu'aucune explication soit trouvée.

A défaut de connaître l'origine du mal, les autorités haïtiennes et les ONG s'attachaient à limiter sa propagation, en intervenant au niveau de la distribution d'eau potable, un des vecteurs de la maladie.

A l'Arcahaie, petite ville au nord de Port-au-Prince, de petits sacs de plastique bleu censés contenir de l'eau «propre», traitée, sont distribués à la population.

Mais Gabriel Thimoté, le directeur général du ministère de la Santé, a indiqué qu'elle n'était peut-être pas bonne pour la santé.

«Je n'ai bu que de l'eau potable», protestait ainsi un malade âgé.

Le choléra est une maladie hautement contagieuse dont la propagation est favorisée par les défaillances des réseaux sanitaires et l'absence d'hygiène.

Aux difficultés dans les zones touchées s'ajoute un climat tendu à la frontière avec la République dominicaine, partiellement fermée par Saint-Domingue. Lundi, des heurts entre la Minustah et des Haïtiens s'y étaient produits.

Malgré tout, Haïti continuait de préparer les élections présidentielle et législatives du 28 novembre. Mardi, une première cargaison de «kits électoraux», composée d'urnes et d'isoloirs, est arrivée dans le pays.