Le Pérou est devenu en 2009 le premier producteur mondial de feuilles de coca, matière première de la cocaïne, dépassant la Colombie où la production en baisse contraste avec la hausse ailleurs dans les Andes, selon un rapport de l'ONU présenté mardi.

Environ 119 000 tonnes de feuilles de coca ont été produites en 2009 au Pérou, contre 103 000 en Colombie, a annoncé Aldo Lale, représentant à Bogota de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), en présentant le volet colombien du rapport annuel sur la production de drogue.

La surface cultivée reste supérieure en Colombie (68 000 hectares), mais elle a reculé (-16%), alors que pour la quatrième année consécutive, elle augmentait au Pérou, à 59 900 ha (+6,8%).

En Bolivie, cette surface a augmenté plus légèrement (+1%) à 30 900 ha. Mais là aussi, c'est la quatrième hausse consécutive.

«Si cette tendance continue, le Pérou dépassera bientôt la Colombie comme premier producteur de cocaïne au monde, statut qu'il n'a plus détenu depuis le milieu des années 1990», a déclaré Antonio Mario Costa, directeur exécutif de l'ONUDC, dans un communiqué.

La Colombie reste pour l'heure première source mondiale de cocaïne, même si la production y est en chute constante, de 600 tonnes en 2007, à 430 en 2008 puis 410 en 2009.

Mais le rapport ne fournit pas de chiffre de production de cocaïne pour le Pérou ni pour la Bolivie, car l'ONUDC est en train de réviser les processus de transformation de feuilles de coca en cocaïne dans ces pays.

En 2008, le Pérou avait produit 302 tonnes de cocaïne, une hausse de 4,1% par rapport à 2007, selon l'ONUDC.

La Bolivie, troisième producteur, avait atteint 113 tonnes (+9%).

Pour M. Costa, le déclin continu de production et de culture de coca en Colombie montre que «la politique de contrôle de la drogue du gouvernement colombien sur les dernières années porte ses fruits».

Cette politique qui visait essentiellement l'éradication massive des cultures jusqu'ici, tend à se diversifier. Elle est notamment financée par une aide américaine de 6 milliards de dollars depuis 2000, dans le cadre du «plan Colombie» de lutte contre la drogue et les guérillas.

«Cultiver la coca en Colombie est devenu clairement plus risqué et moins profitable», ajoute l'agence de l'ONU. «Par contre, les nouvelles sont inquiétantes pour le Pérou».

Nombre d'experts préviennent depuis des années que ce pays a tout pour devenir le premier producteur de cocaïne, avec des conditions idéales de culture (jungle d'altitude) et un territoire difficile à contrôler. Il a en outre moins d'expérience que la Colombie dans la lutte contre l'alliance narcotrafic-guérilla.

Or l'ONUDC affirme que 60% de la coca péruvienne vient de la vallée des fleuves Apurimac-Ene (sud-est) et du Alto Huallaga (nord-est), qui abritent les résidus du Sentier lumineux, la guérilla des années 1990, et échappent en partie au contrôle des autorités.

Devenu prestataire de services pour le trafic de drogue, le Sentier lumineux y contrôle culture de coca, conditionnement et acheminement à dos d'homme.

Le chef des services anti-drogue Romulo Pizarro estimait en 2009 que le trafic générait 22 milliards de dollars, soit près de 17% du PIB péruvien.

Mardi, il a souligné que le problème était «international». «Que les pays consommateurs nous accompagnent» en agissant sur la demande, a ajouté M. Pizarro, avertissant que le pire était sans doute à venir.

«La demande augmente en Asie, même si cela ne se remarque pas encore, et elle va faire pression» sur la production de drogue, a-t-il relevé.