Près de 30 millions de Colombiens étaient appelés dimanche aux urnes pour des élections destinées à renouveler un Congrès terni par le scandale des liens entre plusieurs dizaines d'élus et les milices paramilitaires.

Le président Alvaro Uribe a ouvert à 08H00 le scrutin en soulignant que «la démocratie est (...) une profonde rencontre avec la conscience», et invitant ses compatriotes à voter dans le calme.

Les bureaux de vote resteront ouverts jusqu'à 16H00 pour permettre à 29,8 millions d'électeurs de choisir notamment leurs 102 sénateurs, 166 députés et cinq représentants au Parlement andin.

Le Congrès sortant était dominé par une coalition de droite (72 sénateurs et 103 députés) dont l'image a été ternie par les liens entre les paramilitaires d'extrême droite et au moins 83 élus, pour la plupart appartenant à la majorité qui a porté M. Uribe au pouvoir.

Ces élus sont toujours visés par des enquêtes judiciaires pour les accords qu'ils auraient passés, en particulier avec les «Autodéfenses unies de Colombie» (AUC, démobilisées entre 2003 et 2006).

Les candidats obtenaient le soutien de paramilitaires qui, dans leur zone d'influence, imposaient le candidat de leur choix, y compris par la force, pour s'assurer plus tard le contrôle du territoire visé.

Depuis que le scandale a éclaté, 12 élus ont été condamnés, et des témoignages d'anciens combattants ont mis en lumière l'ampleur des crimes de ces milices : au moins 30 000 assassinats depuis leur création au début des années 1980 pour lutter contre la guérilla.

La campagne électorale a toutefois été quasiment dénuée de débat, paralysée pendant des mois par l'incertitude sur la candidature du président sortant, encore très populaire et qui se serait posé en chef naturel de la majorité conservatrice.

Le 26 février, la Cour constitutionnelle a toutefois écarté la possibilité d'un troisième mandat pour ce dernier à la présidentielle - dont le premier tour est prévu le 30 mai - laissant la majorité sans leader.

Selon les analystes, les Colombiens pourraient cependant décider de maintenir la droite au pouvoir, en soutien à la position de fermeté vis-à-vis de la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes), pierre angulaire de la politique présidentielle de «sécurité démocratique» depuis 2002.

Bien que les Farc soient encore actives, cette politique les a en effet chassées des principales villes.

Les difficultés économiques - 14% de taux de chômage en février, dans un pays où près de la moitié des 46 millions d'habitants vit sous le seuil de pauvreté - et la multiplication de scandales de corruption, pourraient cependant renforcer la gauche.

«Maintenant, il y a plus de sécurité, mais ce gouvernement se consacre uniquement aux armes. Les questions sociales sont délaissées, comme l'éducation», commentait Mariana, 53 ans, fonctionnaire, aux abords d'un bureau de vote de Ciudad Bolivar, grand quartier populaire dans le sud de la capitale.

Vers midi, le chef d'état-major interarmes Freddy Padilla de Leon a assuré que la «journée était à ce stade un succès du point de vue de la sécurité», en dépit de combats ayant opposé l'armée à la guérilla, dans le département de Cauca (sud-ouest), dans lesquels un militaire a été tué.

Selon la Mission d'observation électorale, une ONG indépendante, 420 municipalités sur 1 100 présenteraient des risques de violence associée aux élections, une diminution de 27% par rapport aux municipales de 2007. Mais les risques de fraude, à la hausse, toucheraient 546 municipalités.

Selon la MOE, d'anciens paramilitaires et des narcotrafiquants auraient en effet financé la campagne de certains candidats et chercheraient à acheter des votes pour continuer à peser sur le Congrès.

Les résultats officiels étaient attendus après 22h00 heure locale