Les diverses sections du pouvoir au Honduras se querellent sur le sort à réserver aux responsables du coup d'État de juin dernier. Alors que les congressistes du pays d'Amérique centrale songent à leur accorder l'amnistie, le procureur général hondurien vient de porter des accusations contre les dirigeants de l'armée.

Les accusations visent le commandant des forces armées honduriennes, Romeo Vasquez, et ses plus proches subalternes, dont le commandant de la marine et des forces aériennes.

 

Le procureur Luis Alberto Rubi demande à la Cour suprême de lancer des mandats d'arrêt contre six officiers de haut rang. Il estime que, en arrêtant et en expulsant vers le Costa Rica le président Manuel Zelaya le 28 juin dernier, ils ont commis un «abus de pouvoir» et violé le droit constitutionnel.

La balle est maintenant dans le camp de la Cour suprême, qui a trois jours pour répondre à la requête du procureur général. Le général Vasquez a dit hier aux médias qu'il se soumettrait à la décision de la justice. «Nous sommes des hommes de droit», a-t-il dit.

Mascarade?

De l'ambassade brésilienne au Honduras, où il est réfugié depuis son retour clandestin au pays, en septembre, le président Zelaya a tourné en ridicule les accusations du procureur général et les a qualifiées de «superficielles». Selon lui, la justice cherche à minimiser la gravité du premier coup d'État de l'Amérique latine en 20 ans. «S'ils disent que les forces armées ont fait une erreur, cette erreur s'appelle un coup d'État. Cette erreur a été ratifiée par le Congrès du pays», a tonné l'ex-président.

Expert de l'Amérique latine au Centre pour l'innovation dans la gouvernance internationale (CIGI), Jorge Heine est tout aussi sceptique que le président Zelaya à l'égard du processus judiciaire. «La Cour suprême du pays a été la principale instigatrice du coup d'État. L'idée que cette cour fera quoi que ce soit pour traduire en justice les commandants des forces armées est complètement loufoque, estime l'ex-diplomate chilien. C'est un geste qui vise à sauver les apparences.»

Pressions américaines

La poursuite intentée par le procureur coïncide avec la visite au Honduras du secrétaire d'État adjoint des États-Unis pour l'Amérique latine, Craig Kelly. Ce dernier a notamment rencontré le président Zelaya ainsi que le président de facto du pays, Roberto Micheletti.

En place depuis le coup, M. Micheletti a annoncé publiquement cette semaine que les États-Unis lui ont demandé de remettre le pouvoir au président Zelaya avant le 15 janvier afin qu'il puisse termine son mandat, qui arrive à échéance le 27 janvier.

En échange de cette passation de pouvoir, qui permettrait de rétablir l'ordre constitutionnel avant la prestation de serment de Porfirio Lobo, élu au mois de novembre dans un scrutin controversé, les États-Unis ont promis de débloquer d'importants fonds pour le Honduras, pays le plus pauvre d'Amérique centrale. Qualifiant les Américains de «gringos», M. Micheletti a rejeté d'un revers de main l'offre de M. Kelly.