Quatre mois presque jour pour jour après avoir été mis, en pyjama, à la porte de son pays par l'armée, Manuel Zelaya semble en passe de rentrer au palais présidentiel hondurien par la grande porte. Une entente survenue avec le président putschiste, Roberto Micheletti, dans la nuit de jeudi à hier l'en approche.

L'entente, dont tous les détails ne sont pas connus publiquement, a été conclue après l'intervention de diplomates américains de haut niveau, arrivés à Tegucigalpa mercredi pour faire pression sur Micheletti.

Premier signe d'une trêve entre les deux camps, cette entente prévoit notamment que Manuel Zelaya pourrait retrouver son titre de président si la Cour suprême du pays et le Congrès donnent leur aval. Élu en 2005, Manuel Zelaya pourrait alors terminer les trois derniers mois de son mandat.

«Je suis heureux d'annoncer que mon équipe de négociation a signé une entente qui marque le début de la fin de la situation politique actuelle du pays», a dit Roberto Micheletti dans un communiqué hier. Selon Manuel Zelaya, l'accord «qui ramènera la démocratie au pays» devrait être signé dès aujourd'hui.

On ignore pour le moment quand Manuel Zelaya pourra reprendre les rênes du pays. Les États-Unis ont fait comprendre à M. Micheletti et ses partisans qu'ils voulaient voir l'ordre constitutionnel du Honduras rétabli avant la nouvelle élection présidentielle, prévue pour le 29 novembre. Ni M. Micheletti ni M. Zelaya n'y seront candidats.

Histoire d'une crise

C'est d'ailleurs la tenue imminente de ces élections qui a plongé le pays d'Amérique centrale, le deuxième plus pauvre du continent, dans la crise il y a quatre mois. Craignant que Manuel Zelaya tienne une consultation populaire afin d'obtenir le droit de briguer un nouveau mandat, la Cour suprême du pays, réputée conservatrice, a recommandé la destitution du président Zelaya. Le 28 juin, l'armée a arrêté M. Zelaya en pleine nuit et l'a expulsé vers le Costa Rica. Président du Congrès, Roberto Micheletti l'a remplacé à la tête de l'État, et ce, malgré les protestations de la communauté internationale qui n'a jamais reconnu sa légitimité.

Le 21 septembre, Manuel Zelaya est revenu en catimini dans la capitale hondurienne Tegucigalpa et a trouvé refuge à l'ambassade brésilienne. Hier, le politicien s'y trouvait toujours. Des militaires armés, favorables aux putschistes, encerclaient l'édifice.

Malgré la dose d'incertitude qui entoure toujours l'entente hondurienne, la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton a qualifié l'accord «d'historique» hier. «Je ne peux pas penser à un autre exemple d'un pays d'Amérique latine qui, après avoir vu la rupture de son ordre démocratique et constitutionnel, a réglé une crise de ce genre par la négociation et le dialogue», a dit Mme Clinton du Pakistan, où elle était en visite.

Spécialiste de l'histoire latino-américaine, José del Pozo en vient au même constat. «Cet événement montre que c'est une nouvelle époque que vit l'Amérique latine. Ceux qui tentent de faire des coups d'État sont soumis à une telle pression internationale qu'ils doivent reculer», a indiqué le professeur de l'UQAM.

 

- avec l'AFP, l'AP, le New York Times, Al-Jazeera, The Guardian

 

QUATRE MOIS DE TROUBLES

> 28 juin: Coup d'État militaire. Manuel Zelaya est envoyé au Costa Rica. Roberto Micheletti prend le pouvoir.

> 5 juillet: Zelaya tente un retour mais son avion est intercepté.

> 21 septembre: Zelaya rentre en catimini à Tegucigalpa. Il se réfugie à l'ambassade brésilienne.

> 22 septembre: des milliers de manifestants demandent le retour au pouvoir de Zelaya.

> 29 octobre: Zelaya et Micheletti signent une entente.

> 29 novembre: date prévue des prochaines élections honduriennes.